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gourmer

I.
⇒GOURMER1, verbe trans.
Brider un cheval en lui mettant la gourmette. Il faut gourmer ce cheval plus court (Ac.).
P. métaph. Lorsqu'ils [des auteurs] cesseront de gourmer leur fantaisie (...) ils nous donneront une très bonne pièce qui ne rougira pas d'être comique (COLETTE, Jumelle, 1938, p. 156).
Emploi pronom. réfl., au fig. Affecter un air, un maintien raide et compassé. Sa gaieté même alors est forcée; il se guinde et se gourme jusqu'aux dents (SAINTE-BEUVE, Chateaubr., t. 2, 1860, p. 114). Il se raidit, il se gourme, il se fait solennel (PÉGUY, Clio, 1914, p. 242).
Prononc. et Orth. Cf. gourmer 2. Étymol. et Hist. Cf. gourmer 2.
II.
⇒GOURMER2, verbe trans.
Vieilli, fam. Battre à coups de poing. Léandre, outré de fureur, voulut se jeter sur Scapin et le gourmer (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 134).
Emploi pronom. réciproque. Des écoliers qui se gourment (Ac.). On se chamaillait, on se bousculait, on se gourmait sans vergogne (FABRE, Lucifer, 1884, p. 267).
P. métaph. Ces batailleurs intrépides, qui se gourmaient à qui mieux mieux, quand ils ne gourmaient point quelque vieux mort illustre, dont la célébrité avait trop duré (ROLLAND, J.-Chr., Foire, 1908, p. 686).
Prononc. et Orth. : [], (il) gourme []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Fin XIIIe s.-début XIVe s. [date du ms.] gormé adj. « qui a la gourme » (Du duc Malaquin, 220 ds Nouv. Rec. de Fabliaux, éd. D.M. Méon, II, 286); b) 1583-90 réfl. se gourmer « se battre à coups de poings » (BRANTÔME, Grands Capitaines, François 1er, III, 106 ds GDF. Compl.); 2. a) 1611 « mettre la gourmette à un cheval » (COTGR.) [attesté indirectement par regourmer 1549, EST.]; b) 1563 se gourmer « prendre un air grave ou hautain et dédaigneux » (RONSARD, Responce aux injures et calomnies ds Œuvres complètes, éd. P. Laumonier, XI, 175); c) 1580 gourmer « blâmer, réprimander » (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, I, 23, p. 137); d) 1592 « réprimer ses passions » (ID., ibid., III, 10, p. 1143). Dér. de gourme; suff. puis dés. -er. 1 est issu de gourme méd. (sens 1); b sans doute en raison des tuméfactions qui résultent de coups de poings, comparables à celles laissées sur la peau par la gourme; 2 dér. de gourme (sens 2), proprement « rendre raide comme la gourmette qui entrave le libre jeu de la ganache du cheval ». Fréq. abs. littér. : 19.
DÉR. Gourmade, subst. fém., vieilli, fam. Coup, coup de poing sur la figure. Jeter qqn à la porte avec une gourmade; recevoir des gourmades. Une gourmade dans les dents, sur le nez (Ac.). On parle de gourmades et de bastonnades dans le collège de la rive gauche (AMIEL, Journal, 1866, p. 499). P. métaph. En recevant cette espèce de gourmade en paroles... (BALZAC, Cous. Bette, 1847, p. 56). [] 1re attest. 1606 [date d'éd.] « coup de poing » (J. DE MONTLYARD, Mythologie Epestre ds DELB. Notes mss); de gourmer2, suff. -ade.
BBG. — SKOK (P.). Notes d'étymol. rom. Romania. 1924, t. 50, pp. 213-215.

gourmer [guʀme] v. tr.
ÉTYM. Mil. XVIe; gormé « qui a la gourme; goitreux », v. 1300; de gourme; selon P. Guiraud, le sens II., 2. s'explique par « donner un coup sur la gorge ». → Gourmade.
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I
1 (Attesté 1611, mais probablt antérieur : regourmer, XVIe). Brider (un cheval) avec sa gourmette. || Il faut gourmer ce cheval plus court (Académie). || Si un cheval n'est gourmé, il ne se ramène pas bien (Littré).
2 Fig. Rare. Rendre raide, compassé, gourmé (→ ci-dessous).
0.1 Martial ne tolérait plus les importants, les gens que gonfle et gourme l'esprit de sérieux (…)
Jean-Louis Curtis, le Roseau pensant, p. 344.
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se gourmer v. pron.
ÉTYM. (1563).
Littér. Affecter un maintien raide, compassé.
1 On craignit, en recevant ce phénix berruyer, de ne pas dire des choses assez spirituelles, et naturellement on se gourma devant madame de La Baudraye qui produisit une espèce de terreur parmi la gent femelle.
Balzac, la Muse du département, Pl., t. IV, p. 59.
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gourmé, ée p. p. adj.
ÉTYM. (1732; « goitreux », v. 1300).
Littér. (mais plus cour. que le verbe). Qui affecte un maintien grave, raide. || Une personne gourmée. || Bourgmestres gourmés (→ Flamand, cit.).Par ext. || Air, maintien gourmé. Affecté, cérémonieux, compassé, composé, empesé, 1. grave, important, prétentieux.
2 Lord Dudley, l'un des vieux hommes d'État les plus considérables de l'Angleterre, se tenait debout devant la cheminée, gourmé, plein de morgue, froid, avec l'air railleur qu'il doit avoir au Parlement; il sourit en entendant mon nom.
Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 1027.
3 (…) l'air gourmé, rogue et pédant dont s'arment les magistrats une fois sur leur siège.
Balzac, le Député d'Arcis, Pl., t. VII, p. 668.
4 (…) le cocher, gourmé dans sa livrée, la tête raide en son grand col, demeurait les reins inflexibles et le fouet posé sur un genou.
Maupassant, la Femme de Paul, p. 8.
5 Cécile et Marthe se traitaient l'une l'autre avec une courtoisie distante, comme les élèves de ces pensionnats gourmés où les plus intimes amies se disent « vous ».
J. Romains, Lucienne, p. 125.
6 (…) il était là gourmé et précieux comme un âne chargé de reliques (…)
Sartre, l'Âge de raison, p. 155.
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II Vx.
1 (1580). Critiquer sévèrement.
2 (Fin XVIe). Battre à coups de poings.
7 Buckingham me disait autrefois qu'il avait aimé trois reines, qu'il avait été obligé de gourmer toutes trois (…)
Retz, Mémoires, II, p. 565.
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se gourmer v. pron.
ÉTYM. (1583).
Se battre.Par ext. Se disputer. || « Qu'ils s'accordent entre eux ou se gourment, qu'importe ! » (Molière, les Femmes savantes, II, 6).
8 Le patron et ses deux acolytes juraient, tempêtaient, s'arrachaient les écoutes et le gouvernail des mains. L'un voulait ceci, l'autre voulait cela, et je vis le moment où ils allaient se gourmer.
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 267.
CONTR. (De I., 1., p. p. adj.) Décontracté, naturel, simple.
DÉR. Gourmade.

Encyclopédie Universelle. 2012.