⇒ADORNER, verbe trans.
A.— Vx, littér. Orner, parer avec quelque recherche.
1. [En parlant d'un vêtement] :
• 1. Disons, pour ne rien omettre, que deux pennes de coq, bifurquées comme un cimier de cocuage, adornaient grotesquement son feutre gris allongé en chausse à filtrer.
T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 31.
— Emploi pronom. à valeur passive :
• 2. Madeleine arrive! Endimanchée, je la trouve moins appétissante qu'en sarrau gris. Son chapeau de paille s'adorne d'un ruban de velours cerise, qui jure avec sa robe mauve.
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 250.
2. Rare. [En parlant d'une pers.] :
• 3. ... elle montre son doigt où brille la bague bénie par le prélat et, folle de joie, s'écrie : « mon seigneur Jésus-Christ m'a liée à lui par son anneau et il m'adorne telle qu'une épouse! »
J.-K. HUYSMANS, L'Oblat, t. 2, 1903, p. 28.
B.— P. ext., gén. iron. [En parlant d'une construction, d'un intérieur, et plus gén. de tout ensemble] Garnir d'éléments décoratifs recherchés :
• 4. Ce château frais, neuf, pimpant, blanc et vermeil comme les joues d'une jeune fille, adorné de toutes recherches et magnificences, faisait une satire involontairement cruelle du pauvre manoir délabré, effondré, tombant en ruine au milieu du silence et de l'oubli...
T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 89.
• 5. On avait adorné d'une mise en scène gangstérienne la crise du 13 décembre...
L'Œuvre, 21 janv. 1941.
— Emploi pronom. à valeur passive :
• 6. Quoique ma cellule s'adornât d'une ampoule, elle ne servait strictement qu'aux geôliers dans leurs rondes nocturnes...
F. AMBRIÈRE, Les Grandes Vacances, 1946, p. 350.
Prononc. — 1. Forme phon. — Seule transcription ds LAND. 1834 : -dor-né. 2. Dér. et composés : adornement (arch., cf. Ac. Compl. 1842). — Rem. QUILLET 1934 et ROB. signalent le mot comme arch.
Étymol. ET HIST. — 1. 1145 aorner « apprêter » (EVERARD, Distiques de Caton ds Leroux de Lincy, prov. ds GDF. : tu purras en avant Aorner tun curage); 2. 1160 id. « décorer » (Roman de Troie, 25 149 ds T.-L. : li temple sont a dedmesure Preciosement aorné); 1534 adorner « id. » (M. SCÈVE, La deplourable Fin de Flamete, ch. 29, ds HUG. : Avecques lettres d'or tout autour adornees).
Au sens 1, empr. au lat. adordinare (dep. TERTULLIEN, Scorpiace, 12 ds TLL s.v., 813, 17 : nobis magistros adordinavit); au sens 2, empr. au lat. adornare (dep. TITE-LIVE, 1, 20, 2 ds TLL s.v., 817, 27 : Numa... insignique eum veste et curuli regia sella adornavit); forme adorner, réfection sav. au XVIe s. Les 2 verbes semblent avoir confondu leurs sens à la faveur de l'homonymie.
STAT. — Fréq. abs. litt. :18.
BBG. — BOISS.8.
adorner [adɔʀne] v. tr.
ÉTYM. XIVe; réfection de l'anc. franç. aorner, 1160, d'après le lat. adornare « orner »; repris par archaïsme au XIXe.
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♦ Vx. Orner, parer avec recherche. — Mod. (le mot est marqué et s'emploie normalement avec une intention plaisante ou ironique; il apparaît autrement comme emphatique et prétentieux). || « L'authentique avant-garde, celle qui adorne de séductions inédites la robuste charpente de la réalité (…) » (Libération, 26 nov. 1964).
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s'adorner v. pron. (à valeur passive).
♦ Vx ou littér. Être garni d'ornements recherchés.
0 On le fit asseoir près de la cheminée dont l'énorme hotte s'adornait d'une coquette dentelle de papier rose et s'égayait d'une débandade de souvenirs, photo de mariage, croix de fer sur lit de velours grenat, bouquet de lavande séché (…)
M. Tournier, le Roi des Aulnes, p. 191.
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adorné, ée p. p. adj.
Encyclopédie Universelle. 2012.