ARAIRE
ARAIRE
Forme primitive de la charrue, l’araire apparaît d’abord dans le Croissant fertile (Égypte-Irak), le plus ancien foyer agricole actuellement connu. Toutefois, si la mise en culture de l’orge et du blé est attestée, à Jéricho et à Jarmo, entre \ARAIRE 6800 et \ARAIRE 6500, les témoignages concernant l’araire sont plus tardifs: on les enregistre au début du IIIe millénaire. En Mésopotamie, d’après les premiers pictogrammes sumériens, l’araire se présente comme un objet assemblé. On lui ajoutera même un semoir, nettement figuré sur un cylindre-sceau (\ARAIRE 1500), les grains étant versés dans un entonnoir que prolonge un tube jusqu’au sep, en retrait du soc. Sur les bas-reliefs égyptiens, l’araire est un objet ficelé: sep emmanché sur le timon, une corde retenant les deux pièces. Cet instrument précaire suffit, d’ailleurs, à la tâche que lui assigne la nature du sol. L’araire égyptien, en effet, ne creuse pas de sillon, mais retourne la boue, derrière le semeur, pour enfouir les grains jetés, après l’inondation, dans une terre encore marécageuse. Attelés au timon par un joug de garrot (Mésopotamie) ou de cornes (Égypte), deux bœufs composent l’attelage traditionnel de l’araire.
Les premiers caractères de l’écriture chinoise désignent l’araire (env. \ARAIRE 1500), représenté par ailleurs à l’époque Han (\ARAIRE IIe s.) où il est déjà pourvu d’un soc métallique. Grecs et Romains possèdent un araire dental: très long sep, surmonté d’un age et d’un manche, armé d’un soc (fer ou bois ferré) à deux oreilles. L’avant-train, signalé par Pline, est attesté en Italie du Nord (Tessin). En Europe non méditerranéenne, on connaît l’araire à coutre, utilisé pour un premier labour suivi d’un second avec l’araire à soc. La combinaison, sur le même instrument, de l’avant-train, du coutre et du soc donnera la charrue, qui apparaît vers le VIIe siècle; elle n’entraîne pas pour autant la disparition de l’araire qui subsiste encore.
L’araire, comme les animaux de trait, demeure inconnu en Amérique précolombienne où, cependant, les débuts de l’agriculture (maïs) sont attestés dès \ARAIRE 2500. À l’arrivée des Espagnols, les Incas utilisent toujours la taclla , bâton à fouir dont la pointe est surmontée d’une traverse pour le pied. Les chroniqueurs appelleront charrue à pédale cet instrument primitif. Actuellement, elle est constituée d’un soc triangulaire qui fend la terre et la rejette de part et d’autre d’un sillon peu profond, soc relié au tunoir à l’avant, au mancheron à l’arrière, par une pièce de bois, l’age.
araire [ arɛr ] n. m.
• déb. XIIe arere; région.XVIe; repris 1740; lat. aratrum → arable
♦ Charrue simple sans avant-train.
● araire nom masculin ou quelquefois féminin (ancien provençal araire, du latin aratrum, charrue) Instrument de labour à traction animale, qui rejette la terre de part et d'autre du sillon, à la différence de la charrue, qui retourne la terre.
araire
n. m. Charrue simple dépourvue d'avant-train.
⇒ARAIRE, subst. masc.
AGRICULTURE
A.— Charrue de type primitif à soc triangulaire garni de deux ailes, sans train de roulement ni versoir, qui fend la terre sans la retourner et qui, perfectionnée, est encore utilisée pour le labourage des terres légères et de la vigne :
• 1. C'est la terre légère, mais tout imprégnée de phosphore et de chaux, qu'il suffit de gratter avec l'araire primitif ou de remuer à la bêche pour obtenir les récoltes de blé et de noix qui suffisaient jadis à l'existence des habitants.
VIDAL DE LA BLACHE, Tabl. de la géogr. de la France, 1908, p. 315.
• 2. Il n'y avait plus de bêches et de houes, de pioches et de herses; il n'y avait plus de ces araires pirates qu'on emportait à dos d'homme jusqu'au milieu de la garrigue pour gagner un peu de terre neuve...
GIONO, Le Grand troupeau, 1931, p. 128.
• 3. « On peut être anarchiste avec l'araire romaine ou avec le tracteur moderne, écrit-il [D. A. de Santillan], et nous sommes encore anarchistes quand nous avons le ventre vide. »
GUÉHENNO, Journal d'une « Révolution », 1937, p. 55.
— P. ext. Synon. (parfois poét.) de charrue :
• 4. La bourgeoisie est maîtresse de la France; elle la possède en longueur, en largeur, en profondeur. Elle tient le sol, qu'elle fait trancher, retourner et aplanir par la pioche et l'araire du journalier...
VIGNY, Le Journal d'un poète, 1842, p. 1163.
• 5. Le laboureur qui conduit une araire se fatigue rapidement du fait qu'il a toujours des efforts à exercer sur les mancherons pour rétablir l'équilibre de la charrue...
T. BALLU, Machines agricoles, 1933, p. 83.
Rem. Les dict. indiquent le genre masc. L'emploi fém. est pourtant bien attesté ds la docum. Cf. supra ex. 3 et 5; v. aussi FLAUBERT, Bouvard et Pécuchet, t. 1, 1880, p. 35 : la grande araire de Mathieu de Dombasle.
B.— Au plur., vx. Les araires. Terme générique pour désigner les outils et instruments aratoires (cf. aratoire ex. 2).
Rem. Sens attesté ds Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill.
PRONONC. :[].
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. 1re moitié XIIe s. arere « charrue simple, sans avant-train et sans roues » (Voy. de Charlem. 296 ds GDF. Compl. : Si at cunduit l'arere tant adrecieement, Si fait dreite sa reie cume ligne que tent); 1443 araire (A.N. JJ 176, pièce 280, ibid.); bien attesté au XVIe s. puis repris ds les dict. à partir de BOISTE 1808; 2. 1740 araires subst. plur. (Trév. : Araires. Terme de coutume. En Bresse on appelle araires les instruments de l'agriculture) — 1928, Lar. 20e.
Empr. au lat. aratrum « id. » (CATON, Orig., 5 ds TLL s.v., 400, 1); la forme arere ayant disparu au XIVe s., la forme araire a été empr. à l'a. prov. araire « id. », cf. XIIIe s. E[lie] CAIREL, Pus chai ds RAYN., s.v. Arar; l'a. prov. étant lui-même issu du lat. aratrum (cf. NYROP t. 1, p. 32 et FOUCHÉ Phonét., p. 60).
STAT. — Fréq. abs. littér. :16.
BBG. — CHESN. 1857. — GEORGE 1970. — Mots rares 1965. — PERRAUD 1963. — PLAIS.-CAILL. 1958. — PRIVAT-FOC. 1870.
araire [aʀɛʀ] n. m.
ÉTYM. Déb. XIIe, arere; lat. aratrum « charrue »; régional au XVIe; repris 1740.
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♦ Charrue simple sans avant-train à bâti symétrique, qui ne retourne pas la terre (anciennt ou dans des cultures pré-industrielles). || Age (chambige), timon, mancheron; oreilles, sep d'un araire.
0 Une seule bête y suffit, tirant gaiement le soc ou la herse, avec une sorte d'araire que les Provençaux, Dauphinois et ceux de Languedoc appellent fourquat.
Encyclopédie Universelle. 2012.