HYMNE
HYMNE
Sans doute dérivé de la racine uph («tisser»), le mot «hymne» peut désigner toute sorte de chant, avec la même extension qu’«ode» (tout ce que «chante» l’«aède»). Cependant, Platon, définissant les lois jadis respectées de la musique, caractérise les «hymnes» en les différenciant des «thrènes», des «péans», des «dithyrambes», des «nomes»: «Et une espèce de chant était alors prières aux dieux, auxquelles on donnait le nom d’hymnes» (Lois , 700 b). Les hymnes proprement dits sont donc les anciens chants religieux monodiques, le plus souvent en hexamètres dactyliques, autrefois entonnés par un chantre unique, dont les fonctions sont religieuses; ils se caractérisent par l’invocation des dieux. Tels les hymnes orphiques, les hymnes homériques comme l’invocation d’Arès, les hymnes de libation et de sacrifice, plus tard l’hymne à Zeus du stoïcien Cléanthe; ou, dans d’autres langues, les psaumes de David, et, tout près de nous, le Hölderlin de Germanie par exemple: «Les invoquer, eux, les Bienheureux [...] non...» Mais cette définition précise est, du fait de la poésie grecque en particulier, derechef immense: si le poète est bien un «enthousiaste» comme l’entend le Ion de Platon, son chant appartient aux dieux qui l’inspirent; ainsi les épopées homériques ou la Théogonie d’Hésiode «dépendent» des dieux et s’ouvrent avec gratitude sur une invocation aux Muses qui chantent en personne le chant, hymnique par là même. Ainsi encore Pindare, où l’hymne pour les dieux et l’«éloge» pour les valeureux ne font qu’un, comme dans les Olympiques qui introduisent, après Stésichore, des formes (périodes inégales, épodes), et des rythmes plus variés. Il faudrait donc dire «hymnique» toute poésie dans son rapport au sacré, et «hymnes» les seules invocations aux dieux.
hymne [ imn ] n.
• XIVe; ymne déb. XIIe; lat. hymnus, gr. humnos
1 ♦ N. m. Chant, poème à la gloire des dieux, des héros. Les hymnes orphiques. Hymnes homériques, attribués à Homère.
2 ♦ N. m. ou f. (Dans la tradition chrétienne) Chant à la louange de Dieu. ⇒ cantique, psaume. Chanter un, une hymne. « Toutes les hymnes de cet admirable office » (F. Mauriac).
3 ♦ N. m. Chant, poème lyrique exprimant la joie, l'enthousiasme, célébrant une personne, une chose. Hymne à la nature, à l'amour. « L'Hymne à la joie », de la IXe Symphonie de Beethoven. Un hymne de reconnaissance.
♢ Spécialt Chant solennel en l'honneur de la patrie, de ses défenseurs. L'hymne national français est « la Marseillaise ».
● hymne nom masculin (bas latin ecclésiastique hymnus, du grec humnos) Dans l'Antiquité, chant, poème à la gloire des dieux et des héros, souvent associé à un rituel religieux. Chant, poème lyrique à la gloire d'un personnage, d'une grande idée, d'un grand sentiment. Littéraire. Écrit, discours qui célèbre, vante quelque chose : Ce livre est un hymne à la nature. ● hymne (difficultés) nom masculin (bas latin ecclésiastique hymnus, du grec humnos) Genre et sens Le sens varie selon le genre. 1. Un hymne n.m. = un poème ou un chant païen ou profane. Un hymne à Déméter. Les hymnes nationaux ont retenti. 2. Une hymne n.f. = un chant de l'office, dans la liturgie chrétienne. ● hymne (expressions) nom masculin (bas latin ecclésiastique hymnus, du grec humnos) Hymne national, chant patriotique adopté par chaque pays pour être exécuté lors des cérémonies de la vie publique. ● hymne (homonymes) nom masculin (bas latin ecclésiastique hymnus, du grec humnos) hymne nom féminin ● hymne nom féminin Chant latin ou poème religieux en vers ou en prose, composé en guise de louange à une divinité. ● hymne (difficultés) nom féminin Genre et sens Le sens varie selon le genre. 1. Un hymne n.m. = un poème ou un chant païen ou profane. Un hymne à Déméter. Les hymnes nationaux ont retenti. 2. Une hymne n.f. = un chant de l'office, dans la liturgie chrétienne. ● hymne (homonymes) nom féminin hymne nom masculin
hymne
n.
d1./d n. m. ANTIQ Poème chanté en l'honneur d'un dieu, d'un héros. Hymne à Apollon.
d2./d n. m. Chant national. "La Marseillaise" est l'hymne de la France.
|| Poème lyrique, oeuvre musicale exprimant des sentiments nobles ou enthousiastes. Hymne à la joie: 9 e symphonie de Beethoven.
⇒HYMNE, subst.
A. — Domaine religieux
1. Le plus souvent au masc. [Chez les Anciens] Chant ou poème composé en l'honneur d'un dieu ou d'un héros et souvent intégré dans une liturgie. Hymne grec à Apollon, à Cérès, à Vénus, à Zeus; hymnes orphiques. On trouve ce culte des morts chez les Hellènes, chez les Latins, chez les Sabins, chez les Étrusques; on le trouve aussi chez les Aryas de l'Inde. Les hymnes du Rig-Véda en font mention (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 17). L'hymne au soleil indoue, l'hymne des Védas, ce n'est pas l'hymne au soleil du panthéisme occidental (BARRÈS, Cahiers, t. 13, 1921, p. 154). Le sujet était tiré du superbe hymne homérique à Démeter (STRAVINSKY, Chron. vie, 1931, p. 181).
2. Le plus souvent au fém. [Dans la tradition chrét.] Poème qui célèbre la gloire de Dieu et qui, dans la liturgie romaine, est un élément de l'office divin ou de la messe. Synon. partiel prose. Hymne de Saint Ambroise, de Fortunat, d'Hilaire de Poitiers; hymne de matines, de laudes, de complies. D'autres fois encore, la musique plane et la musique chrétienne (...) prennent ainsi que dans le chant de la Noël, l'Adeste fideles, et dans l'hymne pascal l'O Filii et filiae, le rythme populacier des foules (HUYSMANS, En route, t. 1, 1895, p. 14). J'ignore les hymnes liturgiques, mais je me rappelle encore les cantiques de mon enfance (DUHAMEL, Journal Salav., 1927, p. 152) :
• 1. Aussi jamais peut-être le Dies irae ne produisit-il sur des chrétiens de hasard (...) un effet plus profond, plus nerveusement glacial que le fut l'impression produite par cette hymne...
BALZAC, Ferragus, 1833, p. 132.
B. — Domaine profane, le plus souvent au masc.
1. Chant ou poème lyrique célébrant une personne, un sentiment, un événement, une chose. Hymne d'amour, de douleur, de reconnaissance; hymne à la nature, à la nuit, à la terre; les hymnes de Ronsard. Savez-vous que la fièvre vous inspire joliment, et que votre hymne aux souffrances m'a frappée? (E. DE GUÉRIN, Lettres, 1838, p. 161) :
• 2. Madame de Tècle avait écouté sans les interrompre (...) les paroles enflammées du jeune homme. Peut-être entendait-elle pour la première fois (...) un de ces hymnes brûlants de la passion que toutes les femmes désirent secrètement entendre avant de mourir...
FEUILLET, Camors, 1867, p. 170.
2. En partic. Chant solennel célébrant la patrie et ses défenseurs. Un Américain (...) a légué (...) sa peau pour en faire un tambour sur lequel on battrait nuit et jour l'hymne national américain (CAMUS, Possédés, 1959, 2e part., 8e tabl., p. 1015) :
• 3. Tu sais que, d'ordinaire, je ne suis pas très « Marseillaise ». Je trouve toujours assez drolatique de voir d'honorables bourgeois se mettre sur leurs fumerons et retirer leur huit-reflets pour entendre exécuter un hymne révolutionnaire, plein d'appels aux armes, plein de sang et de fureur, plein de meurtres sacrés.
DUHAMEL, Maîtres, 1937, p. 225.
Rem. Selon la tradition lexicogr., hymne ,,s'emploie ordinairement au féminin en parlant des Hymnes qu'on chante dans l'église`` (Ac.) et au masc. dans les autres sens. Cette distinction ,,n'a rien qui la justifie`` comme l'écrit LITTRÉ, mais elle semble assez gén. observée. Cependant on relève le fém., là où l'on attendrait le masc. (supra Barrès), notamment dans la lang. poét. : L'oiseau (...) S'élève en modulant son hymne aérienne (M. DE GUÉRIN, Poésies, 1839, p. 75). Donc une jeune femme après sa délivrance Remercie fervemment l'arche de l'alliance. Tantôt son hymne ailée se mire dans les eaux, Et tantôt réfléchit de solides tableaux (JAMMES, Géorgiques, Chant 4, 1911, p. 49). Et inversement ex. de Stravinsky, supra.
REM. Hymnique, adj. De la nature de l'hymne. Il serait déplorable que Mendès, (...) l'auteur de ces admirables poèmes théogoniques et hymniques, Pagodes, n'eût pas écrit tant de nouvelles terriblement charmantes (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Biographies de poètes et littérateurs (A. Theuriet), 1896, p. 471).
Prononc. et Orth. : [imn]. Att. ds Ac. dep. 1694. L'orth. a agi sur la prononc. : au XVIe s. on écrivait hynne, hinne conformément à la prononc. [in], résultant d'une assimilation régressive (cf. BUBEN 1935, § 116). Étymol. et Hist. 1. 1re moitié XIIe s. ymne « cantique en l'honneur de Dieu » (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, CXVIII, 171); ca 1200 hymnes matineiles (Dialogue Grégoire, 14, 7 ds T.-L.); 2e tiers XIVe s. id. « cantique latin » Hymne Ave Maris Stella (Du roy Arthus et de Saint Loys ds Nouv. Recueil Fabliaux, éd. A. Jubinal, t. II, 201); 2. début XIVe s. ine « chant, poème à la gloire des dieux et des héros » (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, IX, 2832); 1545 une chanson ou hymne [à Neptune] (Débat d'Eole et Neptune ds Anc. Poésies fr., t. 10, 37); 3. 1537 « chant, poème d'adoration célébrant une personne, une idée, etc. » (CL. MAROT, Cantique, III, 64 ds Œuvres, éd. C.A. Mayer, p. 287 : je ne vueil chanter hymne que de mon roy). Empr. au lat. hymnus, masc. « chant en l'honneur d'un dieu ou d'un héros » (du gr. « id. »), repris par les auteurs chrétiens pour désigner un chant en l'honneur de Dieu, et plus partic. les Psaumes. En a. fr. le mot paraît surtout fém. et RICH. 1680 le donne comme ,,plus ordinairement féminin``; le passage du masc. au fém., parallèle à celui noté dans psaume, est dû à l'e muet final. Fréq. abs. littér. : 1 228. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 2 237, b) 2 127; XXe s. : a) 1 908, b) 1 025.
hymne [imn] n.
ÉTYM. XIVe; ymne, déb. XIIe, au sens 2; var. anc. hynne (XVIe); lat. hymnus, du grec humnos, au sens 1.
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1 N. m. (1545; déb. XIVe, écrit ine). Chant, poème à la gloire des dieux, des héros. || Hymnes babyloniens, égyptiens; hymnes védiques. || Hymnes grecs : hymne en l'honneur d'Apollon (⇒ Péan), de Zeus. || Hymnes orphiques. || Hymnes homériques, attribués à Homère (Hymne à Apollon, à Déméter, à Hermès). || Hymnes de Callimaque, de Proclus. || Les livres d'Hymnes (écrit Hynnes), de Ronsard.
1 Les Hynnes sont des Grecs invention première
Callimaque beaucoup leur donna de lumière,
De splendeur, d'ornement.
Ronsard, Pièces posthumes, Les hymnes.
2 À la vue d'un petit temple (…) le pilote sonna de la trompette, et à ce signal l'équipage entonna l'hymne à la déesse protectrice de l'Attique : « Écoute-nous, aimable Minerve ! (…) »
Baudelaire, le Jeune Enchanteur, Appendice, Pl., p. 1310.
2 N. m. et f. (1680; « cantique »). Chant (chrétien) à la louange de Dieu. ⇒ Cantique, psaume; antienne, chœur (I., 4.), choral, prose, séquence. — REM. Dans la langue liturgique catholique, hymne est généralement employé au féminin. — Hymnes de saint Ambroise, de Fortunat, d'Hilaire de Poitiers. || Hymnes de Jean Damascène. || Les grands compositeurs d'hymnes (hymnographes). || Chanter une hymne. || Le « Dies iræ », hymne désespérée (→ Désolation, cit. 7, Huysmans). || Hymne grandiose (→ Geyser, cit. 2). || Hymne de matines, de laudes, de complies; hymnes des petites heures. || Recueil d'hymnes. ⇒ Hymnaire. || Hymnes historiques, ayant pour objet les « circonstances historiques du mystère célébré » (Lesage). || Doxologie d'une hymne. || L'« hymne angélique » (⇒ Gloria); l'« hymne triomphale, séraphique » (⇒ Sanctus; hosanna).
3 C'est donc avec raison que nos chœurs aujourd'hui
Font résonner un hymne et des vœux à sa gloire.
Corneille, Hymnes, 14.
4 Et Pâques enfin, aux hymnes matinales et joyeuses (…)
Aloysius Bertrand, Gaspard de la nuit, Silves, III.
5 Toutes les hymnes de cet admirable office (…)
♦ Hymnes protestants. || Les hymnes sacrés de Luther. ⇒ Choral.
3 N. m. (1537). On trouve rarement le fém. dans des textes poétiques; le mot est souvent qualifié : hymne à…, de… Chant, poème lyrique exprimant la joie, l'enthousiasme, célébrant une personne ou une chose. ⇒ Hosanna. || Un hymne à la nature, à l'amour, à l'homme. || L'hymne que chantent, gazouillent les oiseaux (→ Frais, cit. 37). || Hymne de joie, de reconnaissance. — Entonner (cit. 5) un hymne en son propre honneur. — Fig. || L'hymne de la couleur (cit. 4, Baudelaire). ⇒ Concert, harmonie, symphonie (fig.). || La nature, hymne au Créateur.
6 Que parlez-vous de lettres, de style épistolaire. En écrivant à ce qu'on aime, il est bien question de cela ! ce ne sont plus des lettres que l'on écrit, ce sont des hymnes.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, Entretien sur les romans…
7 Dans l'hymne de la nature,
Seigneur, chaque créature
Forme à son heure, en mesure,
Un son du concert divin (…)
Lamartine, Harmonies…, I, 3.
8 Tous deux s'étaient promenés en se redisant au matin un hymne d'amour comme en chantaient les oiseaux nichés dans les arbres.
Balzac, Massimila Doni, Pl., t. IX, p. 317.
9 Tout va bien. Salavin entonne, dans le secret de son âme, un hymne de gratitude et de triomphe.
G. Duhamel, Salavin, Deux hommes, IX, p. 249.
♦ Hymnes à la nuit, hymnes sacrés, de Novalis. — L'hymne à la joie, de Schiller, terminant la IXe symphonie de Beethoven.
♦ N. m. Chant solennel en l'honneur de la patrie, de ses défenseurs. || L'hymne national français (la Marseillaise), anglais (God save the King). || Hymne révolutionnaire (→ Drolatique, cit. 3). || Hymnes alliés. || L'hymne et le drapeau d'un pays.
10 L'orchestre joua les hymnes alliés bout à bout. Ils prenaient feu l'un à l'autre.
Cocteau, Thomas l'imposteur, p. 137.
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DÉR. Hymnique.
COMP. Hymnologie. — (Du grec) V. Hymnode, hymnographe.
Encyclopédie Universelle. 2012.