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GOUVERNEMENT PROVISOIRE
GOUVERNEMENT PROVISOIRE

GOUVERNEMENT PROVISOIRE

Régime de fait préparant en principe les voies à un gouvernement de droit. Le gouvernement provisoire, précaire par nature et par destinée, cherche à ordonner son action et à fonder, pour transmettre le pouvoir, des institutions stables et acceptées par le pays. Sa mise en place à l’intérieur ou à l’extérieur du pays répond à des raisons différentes. En France, le gouvernement provisoire de 1848 naît des acclamations populaires recueillies à Paris et veut uniquement organiser une consultation par le suffrage universel; celui de 1870, gouvernement de Défense nationale formé après l’abdication de Napoléon III, veut seulement organiser le pays contre l’invasion allemande. Les gouvernements provisoires formés à l’étranger répondent à des objectifs moins limités et assurent la direction de la lutte armée qui rendra possible le libre retour des partisans de ce gouvernement de fait dans le pays. Ainsi, prise à Alger, l’ordonnance du 3 août 1944 substitue au Comité français de libération nationale le gouvernement provisoire de la République française; elle unifie les résistances extérieures (F.F.L.) et intérieures (F.F.I.); elle coordonne les actions militaires de libération du pays et crée une Assemblée consultative provisoire qui, organisant le référendum du 21 octobre 1945, donnera au pays une nouvelle constitution et un gouvernement de droit. De même en 1958, le Conseil national de la Révolution algérienne (C.N.R.A.) se transforme en gouvernement provisoire de la République algérienne (G.P.R.A.). Comme maints gouvernements révolutionnaires fondés depuis lors — gouvernement révolutionnaire provisoire (G.R.P.) du Sud-Vietnam créé en 1969 et établi à Hanoi; gouvernement révolutionnaire d’union nationale du Kampuchéa (G.R.U.N.K., Cambodge) formé à Pékin par le prince Sihanouk en 1970, etc. —, le G.P.R.A. fait figure de gouvernement en exil, se donne une capitale d’accueil, Le Caire, et accrédite des ambassadeurs. Pour tout gouvernement provisoire établi hors du pays, ce dernier aspect est d’importance capitale et constitue l’une des formes de lutte; la reconnaissance politique d’un gouvernement provisoire passe par la diffusion de ses thèses et permet, sur la base de celles-ci, d’obtenir aides et reconnaissances. Ainsi, créé en 1970, le G.R.U.N.K. voit sa crédibilité progresser de façon essentielle: il est notamment reconnu en septembre 1974 par quarante-cinq pays réunis en conférence à Alger.

Outre l’implantation politique, la force armée et la reconnaissance diplomatique, l’audience dans l’opinion publique du gouvernement provisoire, surtout s’il est en exil, contribue grandement à sa crédibilité et prépare sa légitimation. Une illustration intéressante est donnée par l’évolution de l’opinion publique française à l’égard du G.P.R.A. (Gouvernement provisoire de la République algérienne) constitué au Caire le 14 décembre 1958, soit plus de trois ans et demi avant l’accession à l’indépendance de l’Algérie. D’abord réticente devant un organisme de fait qui ne semble pas avoir vocation d’exercer un véritable gouvernement, l’opinion de la métropole va se modifier au fur et à mesure qu’apparaît la volonté du G.P.R.A. de sortir du provisoire pour donner naissance à un régime définitif.

Le passage à un régime de droit, au moyen du vote de nouvelles institutions par le pays, est donc la raison d’être du gouvernement provisoire. Si, pourtant, il refuse le risque de la légitimation démocratique et souhaite établir des institutions qui ne reposent pas sur la règle de droit, il peut certes devenir un régime définitif, mais fondé sur la crainte; il s’oblige, selon la formule de Montesquieu dans L’Esprit des lois , à «abattre tous les courages et éteindre jusqu’au moindre sentiment d’ambition».

Encyclopédie Universelle. 2012.