GAGE
GAGE
Objet remis par un emprunteur à un prêteur pour garantir le remboursement d’un emprunt. Le prêt sur gage remonte à la plus haute antiquité. Il existait en Chine il y a 2 000 ou 3 000 ans. En Occident, on en retrouve la trace au Moyen Âge. La loi religieuse interdisait alors aux chrétiens le prêt à intérêt, et les taux usuraires pratiqués par les prêteurs qui n’y étaient pas assujettis provoquèrent la création d’institutions charitables destinées à permettre aux pauvres, et aux seigneurs appauvris, d’engager leurs biens pour se procurer de l’argent. En fait, le premier établissement de crédit municipal a été fondé en 1198 à Freising, en Bavière, et le premier mont-de-piété par l’ordre franciscain des Frères mineurs, en Italie en 1462.
De nos jours, alors qu’en Angleterre et aux États-Unis le prêt sur gage est resté une activité privée, l’institution à caractère charitable a subsisté en France et dans d’autres pays. Le Mont-de-Piété de Paris a pris la dénomination de Crédit municipal en 1918, et il existe une vingtaine d’établissements analogues en province, auxquels le public fait appel non seulement pour emprunter des fonds, mais aussi pour assurer la garde d’objets précieux (bijoux, fourrures) pendant les périodes d’absence.
Outre ces prêts sur gage qui contribuent à la solution des problèmes de trésorerie des particuliers, il en existe qui jouent un rôle important dans des opérations économiques de plus grande envergure: les banques accordent des prêts ou des avances sur titres qui sont gagés sur un dépôt de valeurs mobilières effectué par l’emprunteur, ou encore sur des warrants représentant des marchandises entreposées; les gouvernements contractent des emprunts gagés sur leurs recettes fiscales ou parafiscales (douanes, exploitation des tabacs). Le gage est alors constitué, non par un objet physique, mais par un droit que l’emprunteur transfère au prêteur.
gage [ gaʒ ] n. m. I ♦ Ce qu'on dépose ou laisse entre les mains de qqn à titre de garantie.
1 ♦ Contrat de remise d'une chose mobilière à un créancier pour garantir le paiement d'une dette. ⇒ caution, dépôt, garantie, nantissement; arrhes. Un gage de grande valeur. — Loc. Prêteur sur gages. « une reconnaissance du mont-de-piété qui attestait que le valet avait mis sa montre en gage » (Balzac). ⇒ engager.
2 ♦ Biens meubles ou immeubles affectés à la garantie d'une dette. ⇒ sûreté; hypothèque, privilège; aussi non-gage. Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers. Gage commercial.
3 ♦ (Jeux de société) Vx Objet que le joueur dépose chaque fois qu'il se trompe et qu'il ne peut retirer, à la fin du jeu, qu'après avoir subi une pénitence; mod. Pénitence que les autres joueurs imposent au perdant. Avoir un gage.
4 ♦ Ce que l'on consigne entre les mains d'un tiers, en cas de contestation, pour être ensuite remis à la personne qui aura gain de cause.
5 ♦ Fig. Ce qui représente un garant ou une garantie. — (La garantie portant sur l'avenir) ⇒ assurance, promesse. Un gage de fidélité. Donner, prendre des gages. « D'une éternelle paix Hermione est le gage » (Racine). « ces politiciens dont on dit qu'ils donnent des gages aux partis extrêmes » (Romains). — (La garantie s'appliquant au passé ou au présent) ⇒ preuve, témoignage. Gage d'amour. Il « donna des gages de sa sympathie au gouvernement » (Henriot). En gage d'amitié.
II ♦ (XIIe) Au plur. Salaire (d'un domestique). ⇒ appointements. Les gages d'une cuisinière. Mes gages, mes gages ! (Sganarelle dans Dom Juan de Molière). — Par ext. Être aux gages de qqn, être payé par lui pour une activité à son service; par ext. être dévoué à qqn (cf. Être à la solde de). Loc. adj. À GAGES : payé pour accomplir un travail. Tueur à gages.
● gage nom masculin (francique waddi) Contrat par lequel le débiteur ou un tiers se dessaisit au profit du créancier d'un bien meuble afin de garantir le paiement de la dette ; droit du créancier sur le bien meuble. Le bien meuble lui-même affecté à cette garantie : Prêter sur gages. Tout ce qui représente une garantie, une caution : Son honnêteté est le gage d'une gestion irréprochable. Preuve, témoignage de la réalité d'un sentiment, d'une qualité : Un gage d'amitié. Pénitence choisie par les autres joueurs et qu'on doit accomplir quand on a perdu ou commis une faute. ● gage (expressions) nom masculin (francique waddi) Droit de gage général, droit pour le créancier de saisir, au moment où il exerce ses poursuites, tous les biens du patrimoine de son débiteur, de les faire vendre et de se payer sur le prix. ● gage (synonymes) nom masculin (francique waddi) Contrat par lequel le débiteur ou un tiers se dessaisit...
Synonymes :
Tout ce qui représente une garantie, une caution
Synonymes :
- caution
- preuve
- témoignage
gage
n. m.
rI./r
d1./d Objet, bien mobilier que l'on dépose en garantie entre les mains d'un créancier. Prêteur sur gages.
d2./d DR et cour. Bien mobilier qui constitue la garantie d'une dette.
d3./d Ce que l'on consigne auprès d'un tiers jusqu'à ce qu'une contestation soit définitivement réglée.
d4./d à certains jeux, objet que les joueurs déposent à chaque faute et qu'ils ne peuvent retirer qu'après avoir subi une pénitence; cette pénitence.
d5./d Fig. Garantie, preuve, témoignage. Gage d'amitié.
rII./r (Plur.)
d1./d Rétribution d'un employé de maison.
d2./d Loc. adj. (Après le nom.) à gages: rétribué pour un service. Tueur à gages.
⇒GAGE, subst. masc.
I. — Au sing. ou au plur.
A. — Ce que l'on dépose entre les mains de quelqu'un en garantie.
1. DR. ,,Contrat par lequel un débiteur remet à son créancier un objet mobilier pour garantir l'exécution de sa dette`` (Banque 1963). Cf. fiducie ex. :
• 1. 2072. Le nantissement d'une chose mobilière s'appelle gage [it. ds le texte]. Celui d'une chose immobilière s'appelle antichrèse.
Code civil, 1804, p. 372.
♦ Gage vif, gage mort ou mort gage. ,,Celui qui vient ou ne vient pas en déduction de la dette`` (Ac. 1932).
— P. méton. La chose remise en gage. Celui qui ne peut pas trouver une caution, est reçu à donner à sa place un gage en nantissement suffisant (Code civil, 1804, art. 2041, p. 367). Le créancier ne peut, à défaut de paiement, disposer du gage (Code civil, art. 20781804, p. 373).
2. P. ext.
a) Tout meuble ou immeuble garantissant le paiement d'une dette. Mettre en gage, prêter sur gage. Il obtint la remise des villes de Péronne, Roye et Mondidier, qui avaient été assignées en gage de la dot (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 420). Cet hiver, certaines familles mettaient en gage leur argenterie pour donner des bals (MICHELET, Journal, 1835, p. 169).
♦ Prêteur sur gages.
b) Ce qui est déposé lors d'une contestation entre les mains d'une tierce personne par les deux parties et qui sera remis à celui qui a raison. Mettons des gages entre les mains de quelqu'un (Ac. 1798-1878).
3. Spécialement
a) JEUX. Ce qui est déposé par les joueurs perdants et qu'ils ne peuvent récupérer qu'à la fin du jeu moyennant une pénitence. C'est là l'origine d'une pénitence toute semblable que l'on impose, au petit jeu des gages touchés (JOUY, Hermite, t. 3, 1813, p. 62). Les gages furent tirés au sort sur les genoux d'Élodie (A. FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 136).
b) FÉOD. Gant ou gantelet que l'on jetait pour défier quelqu'un au combat. Gage du combat ou gage de bataille (Ac. 1798-1878) :
• 2. ... il ajouta : Voilà le chevalier du Cygne prêt à recevoir le gage de bataille. Pour toute réponse, le roi jeta son gant, qu'Olivier ramassa. Ensuite les deux ennemis (...) se précipitèrent l'un sur l'autre.
GENLIS, Chev. Cygne, t. 3, 1795, p. 357.
B. — Au fig. Ce qui représente une garantie, une assurance de quelque chose. Gage d'alliance, de tendresse. Donnez-moi un gage, un gage d'oubli du passé, d'espoir dans l'avenir! (DE VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 354). Élisabeth lui donna son appui moyennant des gages : la remise du Havre d'abord et plus tard la restitution de Calais (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 168).
1. [Pour le passé] Ce qui sert de preuve, de témoignage :
• 3. ... si (...) [le sous-secrétaire d'État] n'était venu me forcer en quelque sorte à donner de la publicité à ma lettre, publicité qui, au demeurant, devient pour le lecteur un gage de plus de l'authenticité et de l'exactitude de tous les faits mentionnés ici.
LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 553.
2. [Pour l'avenir] Ce qui constitue une promesse formelle, une assurance. Le capitaliste trouve dans l'instrument produit par le travailleur un gage d'indépendance et de sécurité pour l'avenir (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 216). L'immortalité de l'âme, gage de notre béatitude future (GILSON, Espr. philos. médiév., 1931, p. 177).
3. Expressions
— Demeurer pour les gages (vx).
♦ [En parlant de ceux qui sont pris ou tués dans un combat dont les autres parviennent à réchapper] Synon. de succomber. La moitié des siens sont demeurés pour les gages (Ac. 1835, 1878).
♦ [En parlant de circonstances moins graves] ,,Par exemple si dans une hôtellerie, dans un cabaret, on retient quelques gens d'une compagnie, afin qu'ils payent pour les autres qui se sont échappés`` (Ac. 1835, 1878.
— Donner des gages à un parti. Se lier à un parti par un acte attestant son attachement à celui-ci. C'est très malin, son jeu de bascule, les gages donnés un jour aux libéraux, l'autre jour aux autoritaires (ZOLA, Argent, 1891, p. 414).
— Gage de l'amour (vieilli et littér.). Synon. de enfant. Abassa portoit dans son sein le gage funeste de notre union (GENLIS, Chev. Cygne, t. 2, 1795, p. 246).
— Laisser (qqc.) pour gage, pour les gages. Synon. de perdre. Oui, justement, l'île de Fionie; c'est là que j'ai manqué laisser mon nez en gage (MÉRIMÉE, Théâtre C. Gazul, 1825, p. 16).
— Prendre des gages. Prendre des précautions en s'assurant dès maintenant des avantages que l'on n'est pas certain d'obtenir plus tard. Au printemps prochain, l'Allemagne sera défaillante; on le sait. Que se passera-t-il? Il faudra prendre des gages. Autant, dès lors, maintenir ceux que nous avons déjà (BARRÈS, Cahiers, t. 13, 1921-22, p. 194).
II. — Au plur.
A. — Somme que l'on verse mensuellement ou annuellement pour payer les services d'un domestique. Payer les gages. Les gages d'un cocher (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 345). Cela ne suffit pas aux gages des domestiques, aux appointements des maîtres et des maîtresses de tes sœurs, à leur toilette et à la mienne (LAMART., Nouv. Confid., 1851, p. 34).
— (Être) aux gages de qqn.
♦ Vieilli. Être au service de quelqu'un en qualité de domestique. Il est aux gages d'un tel (Ac. 1835-1932).
♦ Être à l'entier service de quelqu'un et, p. ext., lui être aveuglément dévoué. Ils mettent leur génie trafiquant aux gages du sultan ou des Turcs (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 386).
— Casser (qqn) aux gages.
— À gages. Qui est payé pour cette sorte de service. Tueur à gages. Par ce même décret, elle [la Convention] accorda des secours et pensions à tous les anciens serviteurs à gages du ci-devant roi (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 314). Elle a un secrétaire à gages pour l'administration de ses réceptions (MARTIN DU G., Devenir, 1909, p. 153).
♦ Gén. péj. Là, point d'applaudissements à gage, à qui l'on a, pour ainsi dire, noté, sur la pièce, les endroits qu'ils doivent applaudir (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 332). Les chroniqueurs d'alors, tant français que bourguignons, étaient des chroniqueurs à gages. Tout grand seigneur avait le sien (A. FRANCE, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. IV).
— Au fig. et fam. Cet homme ne vole pas ses gages. ,,il s'acquitte bien de ce qu'il est chargé de faire`` (Ac. 1878, 1932).
Rem. On relève a) Qq. attest. au sing. Mlle Trapenard entra donc au service de ce maître, pour n'en plus bouger, au gage de quarante-cinq francs par mois (BOURGET, Discipline, 1889, p. 16). V. aussi JOUY supra. b) L'emploi fém. (plur.) ds HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 78, 166, 182.
B. — Spécialement
1. HIST. ,,Appointements d'un office ou d'une charge`` (LEP. 1948). Un autre moyen, ce fut de retenir la moitié des gages et pensions de tous les officiers de justice et de finance du pays de Bourgogne (BARANTE, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 169). Il avait en meubles plus de cent mille écus d'or, trente mille livres de rentes, et les profits de ses fiefs, et les gages de son office de maréchal (FLAUB., Champs et grèves, 1848, p. 218).
2. MAR. Solde du capitaine, des matelots d'un bâtiment de commerce. Les gages d'un capitaine de navire, d'un matelot (Ac. 1835, 1878).
Prononc. et Orth. : []. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1130 gwage « ce qu'on met ou laisse en dépôt, comme garantie d'une dette, de l'exécution de quelque chose » (Lois de Guillaume, éd. J. E. Matzke, p. 7, § 5); b) ca 1165 guage « ce qu'on donne à quelqu'un à titre de réparation, de satisfaction pour un tort qu'on lui a causé » (BENOIT DE STE-MAURE, Troie, 2595); 2. a) ca 1135 mettre guage « engager quelque chose, mettre en jeu » (Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 1873); b) 1538 terme de jeu (EST. s.v. pignus); 3.) 1694 gage « dans une contestation, enjeu déposé par les différentes parties, pour être remis à celle qui aura gain de cause » (Ac.). B. 1160-74 gages masc. plur. « solde, salaire, appointement » (WACE, Rou, éd. A. J. Holden, 3103). De l'a. b. frq. waddi « gage »; cf. m. néerl. wedde de même sens; a. h. all. wetti « gage, amende »; all. Wette « pari, gageure ». Le mot est attesté aux sens A 1, 3 et B en b. lat. (ca 643 wadium ds NIERM.) ainsi que dans les Gloses de Reichenau (De Libro Genesis, 570 ds H.W. KLEIN et A. LABHARDT, Die Reichenauer Glossen, t. 1, p. 85 : pignus : wadius); il n'est pas exclu que le lat. vas, vadis « caution » ait pu participer à un moment quelconque à la naissance du mot (cf. ERN.-MEILLET). Fréq. abs. littér. : 1 070. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 2 297, b) 1 254; XXe s. : a) 1 470, b) 1 033. Bbg. FRANK (G.). Faire ravoir les gages. Mod. Lang. Notes. 1938, t. 53, pp. 603-604.
gage [gaʒ] n. m.
ÉTYM. XIe; du francique waddi (cf. all. Wette « pari, gageure »), terme de droit germanique. Sans exclure une infl. de ce terme, Guiraud fait de gage un déverbal de guagier. → Gager.
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I Ce que l'on dépose ou laisse entre les mains de quelqu'un à titre de garantie.
1 Dr. et cour. Contrat de remise d'une chose mobilière à un créancier en vue de garantir le paiement d'une dette. ⇒ Caution, cautionnement, dépôt, garantie, nantissement (→ Antichrèse, cit. 1), sûreté; arrhes. || Les arrhes constituent un gage aux mains du vendeur. || Rendre, retirer un gage (→ Débiteur, cit. 1). || Prendre, offrir, donner un gage. || Contrat de gage. || Je vous laisse ma montre comme gage, pour gage. || Mort-gage, vif-gage. ⇒ Mort-gage, vif-gage.
1 Le gage confère au créancier le droit de se faire payer sur la chose qui en est l'objet, par privilège et préférence aux autres créanciers.
Code civil, art. 2 073.
♦ ☑ En gage. || Mettre qqch. en gage. ⇒ Engager. || Laisser qqch. en gage.
2 Il prit adroitement le diamant de son maître, en fit faire un faux tout semblable qu'il remit à sa place, et donna le véritable en gage à un Arménien pour quelques milliers de roupies.
Voltaire, le Blanc et le Noir.
3 Mon cousin (…) chassé, faute de payement, d'un taudis irlandais, quoiqu'il eût mis son violon en gage, vint chercher chez moi un abri contre le constable (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, I, 10, 6, éd. Levaillant, t. I, p. 445.
4 Dans le tiroir à demi fermé de la table, elle aperçut une reconnaissance du mont-de-piété qui attestait que le valet avait mis sa montre en gage quelques jours auparavant.
Balzac, la Recherche de l'absolu, Pl., t. IX, p. 647.
♦ ☑ Loc. Emprunter, prêter sur gages. || Prêteur sur gages.
♦ ☑ Loc. plais. Vx. Demeurer pour gage : être pris, être perdu (alors que les autres, le reste en réchappent). ☑ Laisser (qqch.) pour gage, le perdre.
5 Un vieux renard (…)
Fut enfin au piège attraper.
Par grand hasard en étant échappé,
Non pas franc, car pour gage il y laissa sa queue (…)
La Fontaine, Fables, V, 5.
2 Dr., admin. Biens meubles ou immeubles affectés à la garantie d'une dette. ⇒ Sûreté; hypothèque, privilège. || Les meubles du locataire sont le gage du propriétaire. || Les biens d'Église servaient de gage à la dette de l'État représentée par les assignats (cit. 1; → aussi Assignation, cit.). || Gage commercial.
6 Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers; et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence.
Code civil, art. 2 093.
3 Cour. (Jeux de société). Objet que le joueur dépose chaque fois qu'il se trompe et qu'il ne peut retirer, à la fin du jeu, qu'après avoir subi une pénitence; cette pénitence.
7 (…) les polissonneries du jeudi — avec les petites filles que les parents de mon ami nous fournissaient innocemment, invitant ensemble à goûter les amis de leur fils et les amies de leur fille —, menues faveurs que nous dérobions, et qu'elles nous dérobaient, sous prétexte de jeux à gages.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 27.
4 Ce que l'on consigne entre les mains d'un tiers, en cas de contestation entre deux ou plusieurs personnes, pour être ensuite remis à celle qui aura gain de cause. || Témoin qui reçoit les gages de deux parieurs.
5 Hist. (chevalerie). || Gage de bataille, de combat : gant jeté en signe de défi et d'engagement à combattre.
8 Que l'on ouvre la lice à l'honneur, au courage;
Que les juges du camp fassent tous les apprêts,
Toi, superbe Orbassan, c'est toi que je défie (…)
Je jette devant toi le gage du combat.
(Il jette son gantelet sur la scène).
L'oses-tu relever ?
Voltaire, Tancrède, III, 6.
6 Fig. Littér. ou style soutenu. Ce qui représente un garant ou une garantie. a (La garantie portant particulièrement sur l'avenir). ⇒ Assurance, promesse. || Cette première victoire est le gage de beaucoup (cit. 3) d'autres. || Un gage de l'empressement (cit. 3) qu'on apportera à faire qqch. || Anneau (cit. 8) gage de fidélité. || Ce traité est le gage d'une longue paix. || Je ne veux d'autre gage que votre parole, que votre promesse. || Je voudrais un gage de votre obéissance. — ☑ Donner des gages à un parti : se lier envers lui par quelque acte qui semble engager l'avenir. ☑ Prendre des gages, s'assurer la possession de certains avantages par mesure de précaution. — Le gouvernement refusait de traiter sans gages suffisants. || Otage servant de gage.
9 D'une éternelle paix Hermione est le gage (…)
Racine, Andromaque, II, 4.
10 Laisser près du roi ce renard de jésuite, sans lui avoir donné mes instructions secrètes, sans avoir un otage, un gage de sa fidélité à mes ordres ! quel oubli !
A. de Vigny, Cinq-Mars, VII.
11 (…) le temps que le bonheur mit à éclore fut, pour Joseph Lebas et pour sa femme, un gage de durée.
Balzac, la Maison du Chat-qui-pelote, Pl., t. I, p. 56.
12 Après une résistance convenable, les deux dames consentirent à donner et à recevoir des boucles de cheveux, opération qui se fit au moyen d'un fil qui descendit, et rapporta les gages échangés.
Mérimée, les Âmes du purgatoire, p. 395.
13 Si les goûts opposés avaient été gages de bonheur, elle aurait été bien heureuse.
A. Maurois, Lélia, II, I.
14 (…) nous jetions nos dernières forces dans une attaque sur tous les fronts, et prenions des gages sérieux, avant que les Américains se soient mis en branle.
Martin du Gard, les Thibault, t. VIII, p. 259.
15 Chez lui la crainte de se tromper s'exprimait plutôt par une certaine incohérence, comme chez ces politiciens dont on dit qu'ils donnent des gages aux partis extrêmes.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVII, p. 285.
b (La garantie s'appliquant au passé ou au présent). ⇒ Preuve, témoignage. || Votre conduite en cette affaire est pour moi un gage certain de votre amitié. || Cet artiste a donné des gages de son talent (→ Exorde, cit. 3). || Un gage d'amour (→ Effeuiller, cit. 2). || En gage d'amour, d'amitié. — ☑ Loc. Vx. Un gage de l'amour : un enfant. ☑ Le gage d'une union (même sens).
16 Quel bonheur qu'aucun gage d'une union aussi détestée (…)
Beaumarchais, le Mariage de Figaro, V, 14.
17 Dans ce soupir, dans ce visage maternel, tremblant d'alarme, mais de douceur aussi, et où elle aurait pu lire comme un gage d'acceptation, sa sensibilité ombrageuse ne voulut voir qu'une tristesse désapprobatrice.
Martin du Gard, les Thibault, t. VIII, p. 46.
18 Benjamin Constant (…) revint à Paris, et, passionné pour la liberté (…) donna des gages de sa sympathie au gouvernement des Cinq-Cents (…)
Émile Henriot, Portraits de femmes, p. 240.
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II (XIIe). Au plur.
1 Les gages. Somme que l'on donne à un domestique pour paiement de ses services. ⇒ Appointement, salaire. || Les gages d'un domestique, d'un valet de chambre, d'une cuisinière (cit. 3; → aussi Employer, cit. 16). || On le retiendra sur vos gages.
19 Ah ! mes gages ! mes gages ! Voilà par sa mort un chacun satisfait (…) Il n'y a que moi seul de malheureux, qui, après tant d'années de service, n'ai point d'autre récompense que de voir à mes yeux l'impiété de mon maître punie (…) Mes gages ! mes gages ! mes gages !
Molière, Dom Juan, V, 6 (éd. 1683 A).
20 (…) c'était un de ces fidèles serviteurs dont les modèles sont devenus trop rares en France, qui (…) grondent les enfants et quelquefois les pères, s'exposent à la mort pour eux, les servent sans gages dans les révolutions (…)
A. de Vigny, Cinq-Mars, I.
21 César eut la nourriture, six francs de gages par mois, et fut couché sur un grabat, au grenier, près de la cuisinière (…)
Balzac, César Birotteau, Pl., t. V, p. 342.
REM. Le mot, comme tout ce qui touche à la domesticité, ne s'emploie plus guère qu'en parlant du passé ou stylistiquement.
2 Vx. Rétribution. — ☑ Loc. Casser qqn aux gages. ☑ Être aux gages de qqn, être payé par lui pour une activité à son service; (par ext.) être au service de, sous la dépendance de qqn. || Se mettre aux gages de qqn (→ Art, cit. 58). || Ne pas voler ses gages.
22 (…) il est aux gages du besoin; il a beau tenir bon, et protester qu'il n'écrira pas sur commande, il vit de sa plume, il est serf des engagements qu'il doit prendre.
André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski », III.
3 ☑ Loc. … à gages : qui est payé pour remplir tel ou tel rôle. (Anciennt). || Spadassin, sbire à gages. — Mod. || Tueur à gages; cf. Tueur sans gages, pièce de Ionesco. || Un insulteur à gages. — REM. De nos jours, à gages se prend toujours en mauvaise part.
23 Toutes les plumes de folliculaires à gages, bien astiquées, qui attendaient.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XVIII, p. 235.
24 Jean-Paul Sénac, je l'ai dit, végétait dans l'ombre d'un politicien nommé Coualieux qui le tyrannisait quand il n'avait pas quelque besoin précis de son humaniste à gages (…)
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, V, IV.
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DÉR. Gagiste — V. Gager.
COMP. Non-gage.
HOM. Formes du v. gager.
Encyclopédie Universelle. 2012.