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CI-DEVANT
CI-DEVANT

CI-DEVA

L’expression de ci-devant se dit fréquemment au XVIIe et au XVIIIe siècle des personnes et des choses dépossédées de leur état ou de leur qualité. Le terme en vint à désigner pendant la Révolution les anciens nobles.

Si Chateaubriand a pu dire que «les plus grands coups portés à l’antique constitution de l’État le furent par des gentilshommes; les patriciens commencèrent la Révolution», la noblesse devait en réalité beaucoup souffrir de cette révolution.

Dans la nuit du 4 août 1789, elle a renoncé à ses privilèges, mais non à ses titres. Le décret du 19-23 juin 1790 déclare: «La noblesse héréditaire est pour toujours abolie.» Les qualifications nobiliaires (Monseigneur, Éminence, Grandeur, Excellence) sont supprimées. Armoiries et livrées subissent le même sort. Les ordres de chevalerie disparaissent à leur tour. Commencés le 30 juillet 1791, les débats de l’Assemblée aboutissent en effet à la suppression de «tout ordre de chevalerie ou autre, toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui suppose des distinctions de naissance».

Cette suppression de la noblesse est réclamée depuis longtemps. Les attaques dans les libelles de 1788 à avril 1789 n’ont pas manqué: les exemptions fiscales sont dénoncées comme «un délit national» et les privilèges qualifiés d’anarchistes. Est-il nécessaire de citer les tirades de Beaumarchais dans Le Mariage de Figaro ? La réaction nobiliaire des dernières années du règne de Louis XVI a excité les passions. «Qu’est-ce qui a fait la Révolution? disait Napoléon. La vanité. La liberté n’a été qu’un prétexte.»

Privé de tous ses droits par les mesures des 6 juillet et 25 août 1792, puis par celles du 17 juillet 1793, le ci-devant est devenu un suspect pendant la Terreur. Ses biens sont confisqués lorsqu’il émigre (loi du 28 mars 1793). S’il est resté, il connaît souvent la prison (loi du 17 septembre 1793), qu’évoquent de nombreux mémoires (Beugnot, Pasquier...), et même l’échafaud. Il convient toutefois de ne pas exagérer les pertes de l’aristocratie: 15 p. 100 de ses membres, appartenant surtout à la haute noblesse, sont victimes de la Terreur. La fortune de l’ordre est davantage éprouvée, mais moins qu’on ne l’a écrit. Dans bien des régions, il y a peu de changements: prête-nom, divorce fictif, intendant achetant le domaine, autant de moyens qui ont permis de tourner la loi. C’est le clergé qui fait les frais de la vente des biens nationaux. Mais, quand les nobles retrouvent leurs domaines, c’est souvent pour en constater le délabrement. Rémusat note dans ses Mémoires : «Le séquestre, les mesures révolutionnaires, les mauvaises années, les difficultés de tout genre avaient dégradé les propriétés, supprimé les revenus, aggravé les dettes.» Ainsi s’explique avec de notables exceptions l’entrée des ci-devant dans la noblesse d’Empire après 1808.

1. ci [ si ] adv.
XIIe; abrév. de ici
1Dr. Ici (opposé à ). Les témoins ci-présents. CI-GÎT. ci-gît.
2Cour. placé immédiatement devant un adj. ou un participe. CI-ANNEXÉ, ÉE [ sianɛkse ] ; CI-INCLUS, USE [ siɛ̃kly, yz ] ; CI-JOINT, JOINTE [ siʒwɛ̃, ʒwɛ̃t ] ( 1. joint). REM. Le mot ainsi formé s'accorde s'il est placé après le nom (valeur d'adj.) mais reste inv. quand il est placé avant (adv.). Certains accordent lorsqu'un déterminant est intercalé (ci-jointe la lettre). La copie ci-incluse. Vous trouverez ci-inclus une copie de notre facture.
Après un nom précédé de ce, cette, ces, celui, celle ou après un pron. dém. Cet homme-ci. À cette heure-ci. Ces jours-ci. Celle-ci. Ceux-ci.
3Loc. adv. (Pour localiser dans un texte écrit). Ci-après : un peu plus loin. Ci-contre : en regard, vis-à-vis. Ci-dessous : plus bas. ⇒ infra. Ci-dessus : plus haut. ⇒ supra (cf. aussi ces adv.).
(1749) Vx Ci-devant : précédemment. Spécialt (pendant et après la Révolution) Une ci-devant duchesse. « Talleyrand, ci-devant noble, ci-devant prêtre, ci-devant évêque » (Madelin). Absolt Les ci-devant : les nobles. « Cette ci-devant n'a pas l'air sot » (Yourcenar).
4Loc. adv. DE-CI DE-LÀ [ dəsidəla ] :de côté et d'autre, au hasard (cf. Çà et là). Flaner de-ci de-là. « Elle avait beaucoup appris de-ci de-là, par bribes » (R. Rolland). PAR-CI PAR-LÀ :en divers endroits. Quelques erreurs par-ci par-là. Fig. (Exprimant la répétition) « Depuis ce matin on m'assomme avec Nana; et Nana par-ci, et Nana par-là ! » (Zola).
⊗ HOM. Scie, si, sis, six.

ci-devant adjectif et nom invariable Se disait de personnes dépossédées de leur état, de leur qualité, de leur titre, en particulier pendant la Révolution française : Le ci-devant roi.ci-devant (difficultés) adjectif et nom invariable Orthographe Invariable en genre et en nombre : une ci-devant baronne ; les ci-devant. Sens L'adverbe (vieux) signifie « avant, précédemment » : « Je ne pense ni plus ni moins à votre sœur que ci-devant »(Bossuet) ; l'adjectif signifie « précédent, d'autrefois » : « M. de Chaudour [...] était un ci-devant jeune homme, encore mince à quarante-cinq ans »(H. de Balzac) ; le nom, sous la Révolution, désignait un noble : « C'était un de ces ci-devant qui servirent noblement la République »(H. de Balzac).

⇒CI-DEVANT, loc. adv., adj. et subst.
I.— Loc. adv., arch.
A.— [Dans un texte] Précédemment. Synon. ci-dessus. Le tableau ci-devant permet de se faire une idée de la progression du matériel de gros calibre utilisé sur le front pendant l'année 1915 (JOFFRE, Mémoires, t. 2, 1931, p. 14).
Rem. L'anton. ci-derrière est attesté exceptionnellement. À notre entrée [à Genève], (...) on nous remit (...) un bulletin facétieux commençant (...) par cette recommandation drolatique : Voir ci-derrière (...) une foule de formalités à remplir (T. GAUTIER, Italia, Voyage en Italie, 1852, p. 3).
B.— Autrefois, jadis. Malgré son nouveau nom d'école royale comme ci-devant (J.-G. PROD'HOMME, Les Symphonies de Beethoven, 1921, p. 323).
II.— Loc. adj. inv.
Arch. Ancien. L'Italie est insupportable aux gens aimables, aux ci-devant jeune-hommes, aux vieux courtisans (STENDHAL, Hist. de la peinture en Italie, t. 2, 1817, p. 146). Les troupes de la ci-devant province des Trois-Évêchés (ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, t. 1, 1870, p. 298).
Spéc. [En parlant d'un ancien noble qui a perdu ses titres au moment de la Révolution de 1789 (sous-entendu comte, marquis, etc.)] Un ci-devant marquis. La femme était la ci-devant duchesse de Morny (E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1868, p. 456). La destinée de leur ci-devant roi (ROBESPIERRE, Discours, Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 188).
III.— Subst. inv. Un, une ci-devant. Un noble. L'ordre que j'ai reçu du ministre m'apprend qu'elle se nomme mademoiselle de Verneuil. C'est une ci-devant (BALZAC, Les Chouans, 1829, p. 85).
Plur. Des ci-devant. Ils [mes grands parents] furent, je le sais, de sentiments, sinon de naissance, des ci-devant, des aristocrates (COPPÉE, Contes rapides, 1889, p. 264).
Prononc. :[]. Étymol. et Hist. 2e moitié du XIIe s. loc. adv. (Dialogue Grégoire, 10, 24 ds T.-L. : Li [...] beirs ki ci devant fut nomeiz [praedictus]); 1534 temp. par cy davant « auparavant » (RABELAIS, Gargantua, éd. Marty-Laveaux, t. 1, p. 122); 1791 loc. adj. inv. la ci-devant cour de France (Mme DE STAËL, Lettres de jeunesse, p. 432); 1793 subst. un ci-devant (LAYA, L'Ami des loix, III, 3, p. 52). Formé de ci1 et de devant. Fréq. abs. littér. :219. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 373, b) 436; XXe s. : a) 537, b) 55. Bbg. MAT. Louis-Philippe 1951, pp. 234-235. — TOURNEMILLE (J.) Ci-devant. Vie Lang. 1963, p. 486.

Encyclopédie Universelle. 2012.