Akademik

évanouir

évanouir (s') [ evanwir ] v. pron. <conjug. : 2>
esvanoïr « disparaître » XIIe; lat. pop. °exvanire, altér. de evanescere évanescent
1Disparaître sans laisser de traces; cesser d'être visible. disparaître, s'effacer, s'évaporer. Silhouette qui s'évanouit à l'horizon, dans la nuit ( évanescent) . Apparition qui s'évanouit brusquement, comme par enchantement. Image un instant aperçue et qui s'évanouit aussitôt. se dissiper.
2Fig. Cesser d'exister. Son autorité, sa gloire se sont évanouies. Sentiment, sensation, souvenir qui s'évanouit. s'envoler; aussi fugace, fugitif. « Peu à peu son souvenir s'évanouissait, j'avais oublié la fille de mon rêve » (Proust). « toutes mes bonnes résolutions s'évanouissaient » (Fénelon).
3Perdre connaissance; tomber en syncope. défaillir, se pâmer; fam. collapser (cf. Se trouver mal, tourner de l'œil, tomber dans les pommes). S'évanouir d'émotion, d'épuisement, de douleur. Être prêt à s'évanouir. J'ai failli m'évanouir, j'ai cru que j'allais m'évanouir. Elle « tomba d'une masse aux pieds du vieillard. Elle s'était évanouie » (Green).
⊗ CONTR. Apparaître. Revenir (à soi).

évanouir (s')
v. Pron.
d1./d Perdre connaissance. S'évanouir de peur.
d2./d Disparaître entièrement. Le brouillard s'est évanoui. Syn. se dissiper.
(Personnes) Il s'est évanoui dans la nature.

évanouir (s') [evanwiʀ] v. pron.
ÉTYM. V. 1150, soi esvanir; esvanoïr « disparaître », v. intr. jusqu'au XVIIe; du lat. pop. exvanire, altér. de evanescere (→ Évanescent), au prétérit dans ce passage de l'Évangile selon saint Luc (XXI, 31) : Et ipse evanuit ex oculis eorum « et il disparut de devant eux ».
———
I Littér. (Sujet. n. de chose ou de personne).
1 Disparaître sans laisser de traces; cesser d'être visible. Disparaître, effacer (s'), évaporer (s'). || Silhouette qui s'évanouit à l'horizon. || S'évanouir dans les airs. Envoler (s'). → Elfe, cit. 2. || Voiture qui passe en trombe et s'évanouit dans la nuit (→ Bolide, cit. 1). || Astre qui s'évanouit derrière un nuage. Éclipser (s'). || Apparition (cit. 11), fantôme, démon qui se manifeste et s'évanouit brusquement. || S'évanouir comme par enchantement (cit. 6), comme une ombre, un songe. || Apparence, image, perspective un instant aperçue et qui s'évanouit aussitôt. Dissiper (se). || Les ennemis s'évanouirent en un clin d'œil. Enfuir (s'), fuir.Son qui s'évanouit. Cesser, mourir.S'évanouir en (qqch.) : laisser la place à (qqch.).Couleur qui s'évanouit dans une autre. Fondre (se).
1 (…) ne faire qu'apparaître dans sa maison, s'évanouir et se perdre comme un fantôme dans le sombre de son cabinet (…)
La Bruyère, les Caractères, VII, 6.
2 Le lendemain on cherchait les vieux voyageurs; mais ils s'étaient évanouis comme ces saintes apparitions qui visitent quelquefois l'homme de bien dans sa demeure.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, IV, III, VI.
3 Le pape mena contre eux quelques Allemands et une nuée d'Italiens. Au moment du combat les Italiens s'évanouirent, et laissèrent le belliqueux pontife entre les mains des Normands.
Michelet, Hist. de France, t. II, p. 248.
4 Mais il ne poussa qu'un soupir, Et s'évanouit comme un rêve.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Nuit de décembre ».
5 Chaque fois qu'elle évoquait le souvenir de Jacques, le bleu de ses prunelles fonçait insensiblement, un peu de rougeur envahissait ses tempes, et sur tout le visage affleurait une expression particulière, ardente, et comme inassouvie, qui s'évanouissait aussitôt.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 44.
5.1 Rue du Cherche-Midi, après une soirée difficile, X… m'expliquait très bien, d'une voix précise, aux phrases formées, éloignées de tout indicible, qu'il souhaitait parfois s'évanouir; il regrettait de ne pouvoir jamais disparaître à volonté.
R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, p. 17.
2 Fig. Cesser d'exister. || S'évanouir dans le passé. Finir, terminer (se). || Son autorité (cit. 18), sa gloire, sa puissance se sont évanouies. || Ses richesses se sont évanouies. Fondre.Nos dissensions (cit. 3) se sont vite évanouies. || Ces principes s'évanouissent à l'application (→ Drame, cit. 4).
6 Et qu'à jamais leur morte renommée
S'évanouisse ainsi qu'une fumée (…)
Ronsard, Discours des misères de ce temps, Prière à Dieu…
7 (…) que les offenses d'un fils s'évanouissent vite au moindre mot de repentir !
Molière, Dom Juan, V, 1.
8 (…) la force, la santé, la joie s'évanouiront comme un beau songe (…)
Fénelon, Télémaque, XIV.
9 (…) les mots, où s'évanouit sans recours l'essentiel de la pensée (…)
J. Paulhan, les Fleurs de Tarbes, p. 66.
Sentiment, sensation, souvenir qui s'évanouit. Envoler (s'); et aussi fugace, fugitif. || Sa haine s'est évanouie (→ Attacher, cit. 92). || Rêve, espérance qui s'évanouissent (→ Crise, cit. 10; espérance, cit. 13). — ☑ Loc. S'évanouir en fumée.
10 Mais le danger s'oublie, et cette peur si grande
S'évanouit bientôt (…)
La Fontaine, Fables, X, 14.
11 (…) toutes mes bonnes résolutions s'évanouissaient.
Fénelon, Télémaque, IV.
12 Quand on cesse d'aimer, la personne qu'on aimait reste la même qu'auparavant, mais on ne la voit plus la même; le voile du prestige tombe, et l'amour s'évanouit.
Rousseau, Émile, IV.
13 Ses préoccupations d'avenir, chaque jour plus effacées, allaient s'évanouissant tout à fait dans le bien-être de son corps reposé.
Loti, Matelot, XXIV.
14 Peu à peu son souvenir s'évanouissait, j'avais oublié la fille de mon rêve.
Proust, À la recherche du temps perdu, t. I, p.13.
En emploi factitif, avec ellipse du pronom personnel. || Faire évanouir toutes les espérances. Anéantir, dissiper, détruire.
15 On en a vu (des maux)… qui ont sapé par les fondements de grands empires, et qui les ont fait évanouir de dessus la terre (…)
La Bruyère, les Caractères, X, 7.
16 Le spectacle de la mort de Virginie (…) fit évanouir la puissance des décemvirs.
Montesquieu, l'Esprit des lois, XI, 15.
16.1 (…) il estimait qu'il en faisait disparaître toute la valeur, évanouir la signification de même que la mesure précise de l'abscisse d'une particule exclut la connaissance de sa quantité de mouvement dit-on.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 168.
———
II Cour. (Sujet n. de personne). Perdre connaissance; tomber en syncope. Défaillir, pâmer (se); mal (se trouver mal); → Perdre conscience, tomber en faiblesse, en pâmoison, en syncope; (fam.) tourner, virer de l'œil (supra cit. 47), tomber dans les pommes (supra cit. 12), dans les bégonias. || S'évanouir d'émotion, de peur, d'effroi, d'épuisement, de douleur. || Faillir, être prêt à s'évanouir (→ Éblouissement, cit. 4). || J'ai cru que j'allais m'évanouir, j'ai pensé m'évanouir.
17 Bientôt après, il s'évanouit; de sorte qu'on le cuida (qu'on pensa l') abandonner pour trépassé : enfin, on le réveilla à force de vinaigre et de vin.
Montaigne, Essais, I, Appendice, Montaigne et La Boétie, éd. Garnier, p. 382.
18 Tout à coup Adrienne glissa sur la poitrine de son père et tomba d'une masse aux pieds du vieillard. Elle s'était évanouie.
J. Green, Adrienne Mesurat, p. 51.
Fig. et littér. || S'évanouir dans, en (qqch.) : être totalement absorbé par (qqch.). || S'évanouir dans la musique.
——————
évanoui, ie p. p. adj.
ÉTYM. (1130, esvanoïz).
1 Littér. Disparu; qui n'est plus perceptible. || Fantôme évanoui.Qui n'existe plus. || Puissance, gloire évanouie. || Sensation, souvenir, rêve, songe évanoui. || Temps évanoui (→ Aurore, cit. 23; disparaître, cit. 4).
19 (…) tous les beaux faits que nous chante l'histoire Des siècles évanouis (…)
Molière, le Malade imaginaire, Prologue.
20 Toute chose pour toi semble être évanouie (…)
La Fontaine, Fables, VIII, 1.
21 Eh bien ! ces songes sont évanouis, ces nœuds rompus, ces serments oubliés (…)
A. de Vigny, Cinq-Mars, Absence, t. II, p. 315.
22 Il vaudrait mieux ne pas écrire, puisque les lettres ne montrent que des sentiments évanouis, des idées effacées.
France, le Lys rouge, XXVIII, p. 206.
23 Son amertume et sa colère évanouies ne lui laissaient plus que l'impatient désir de tout oublier (…)
France, le Lys rouge, XXIII, p. 180.
2 Cour. (Personnes). Sans connaissance; tombé en syncope. || Tomber évanoui. || On l'emporta évanoui. || Rester longtemps évanoui, puis revenir à soi.
24 (…) toujours évanouie,
Madame, elle ne marque aucun signe de vie (…)
Racine, Bajazet, IV, 5.
25 Je proteste encore contre ceux qui prétendent que je suis tombé en apoplexie; je n'ai été évanoui qu'un quart d'heure tout au plus (…)
Voltaire, Lettre à d'Argental, 2998, 3 janv. 1767.
26 (…) sa vue faible et fatiguée se troubla, sa tête malade fut saisie d'un vertige qui refoula le sang vers son cœur. — Richelieu ! cria-t-il (…) Et il tomba évanoui dans un fauteuil. Lorsque le Roi rouvrit les yeux, ranimé par les odeurs fortes et les sels (…)
A. de Vigny, Cinq-Mars, Le travail, t. II, p. 376.
27 J'avais perdu connaissance, tout en me maintenant encore debout. Je me traînai, comme je le pus, jusqu'à mon appartement : je n'avais qu'une idée, c'est qu'on ne me trouvât pas évanoui dans les escaliers.
E. Fromentin, Dominique, XVII.
28 (…) toutes sensations parurent s'engloutir comme dans un plongeon fou et précipité de l'âme dans l'Hadès. Et l'univers ne fut plus que nuit, silence, immobilité. J'étais évanoui; mais cependant je ne dirai pas que j'eusse perdu toute conscience. Ce qui m'en restait, je n'essaierai pas de le définir, ni même de le décrire (…)
Baudelaire, Trad. E. Poe, Nouvelles histoires extraordinaires, « Le puits et le pendule ».
N. Rare. || Un évanoui, une évanouie : personne en état d'évanouissement.
29 Elle (…) fit l'évanouie et se fit reporter sur son lit (…)
Racine, Notes historiques, XXXIX.
CONTR. Apparaître, arriver, dessiner (se), montrer (se); commencer, durer, persister; affirmer (s'), augmenter, croître. — (De II.) Revenir (à soi).
DÉR. Évanouissant, évanouissement.

Encyclopédie Universelle. 2012.