écumer [ ekyme ] v. <conjug. : 1>
• escumer v. 1135; de écume
I ♦
1 ♦ V. intr. Se couvrir d'écume. ⇒ mousser. Mer qui écume. « Ton beau lac, il écume aujourd'hui comme une mauvaise mer » (Martin du Gard). ⇒ moutonner.
2 ♦ Baver.
♢ Fig. Écumer (de rage, de colère) : être au comble de l'exaspération. ⇒ bouillir.
II ♦ V. tr. (XIIIe)
1 ♦ Débarrasser de l'écume, des impuretés. Écumer le pot-au-feu, le sirop, la confiture. Écumer l'étain fondu. Par métaph. « Il devait parfois écumer ses idées bouillonnantes » (Renard).
2 ♦ Par ext. Écumer les mers, les côtes, y exercer la piraterie.
♢ Par anal. Piller, en raflant tout ce qui est profitable ou intéressant. Les antiquaires ont écumé la région.
● Écumer être furieux.
écumer
v.
rI./r v. intr.
d1./d Se couvrir d'écume. La mer écume.
d2./d (Animaux) Baver. Le taureau écumait.
— Fig. être exaspéré. écumer de rage.
rII./r v. tr.
d1./d ôter l'écume de la surface (d'un liquide). écumer un bouillon.
d2./d Fig. écumer les mers, y pratiquer la piraterie.
— Par ext. Des gangsters ont écumé le quartier.
⇒ÉCUMER, verbe.
A.— Emploi intrans. Produire de l'écume, se couvrir d'écume.
1. [Le suj. désigne un liquide ou un cours d'eau; correspond à écume A] (Quasi-)synon. mousser. Coupeau versait [le vin] de haut, pour voir le jet rouge écumer (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 579). Le petit ruisseau qui écume à toutes les pierres (RENARD, Journal, 1895, p. 281).
2. [Le suj. désigne un animal ou une pers.; correspond à écume B] Synon. baver. Une épileptique se convulsa, écuma sur son brancard (ZOLA, Lourdes, 1894, p. 150). Les molosses écument et aboyent de plus belle (MARTIN DU G., Vieille Fr., 1933, p. 1081).
— Au fig. Être transporté de colère, de rage. Synon. enrager. J'écume de colère et les yeux me sortent de la tête (MUSSET, Fantasio, 1834, II, 6, p. 228). En écumant de rage, il éclatait contre son frère (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 21).
B.— Emploi trans.
1. [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne une préparation culin.] Enlever l'écume de. Écumer des confitures. Écumer le pot-au-feu et éplucher les carottes (FRANCE, Pt Pierre, 1918, p. 120).
— P. anal., TECHNOL. [L'obj. désigne un métal en fusion] Débarrasser de ses impuretés. Avant la coulée, écumer le métal fondu (CHAMPLY, Nouv. encyclop. prat., t. 3, 1927, p. 73).
— Au fig., fam., vx ou région. (Ouest). Écumer le pot, la marmite. Vivre aux dépens de quelqu'un, tirer habilement profit d'une situation. Tant que bouillira la marmite, Nous serons là pour l'écumer (MURGER, Nuits hiver, 1861, p. 41).
2. Au fig. [Le suj. désigne une pers.; l'obj. désigne un inanimé ou une pers.] Se livrer à la piraterie sur. Ces mers resserrées que les pirates pouvaient écumer sans risques (VERNE, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 38). Les cargaisons de noirs que j'avais été écumer sur la mer (CLAUDEL, Soulier, 1929, 3e journée, 3, p. 787) :
• ... les Vikings, pirates qui viennent périodiquement écumer les côtes européennes et razzier impitoyablement l'arrière-pays.
P. ROUSSEAU, Hist. des transp., 1961, p. 113.
— P. ext. Piller, en gardant le meilleur; escroquer. Écumer les affaires, les maisons de jeu (Ac. 1932). Victor Hugo (...) a passé sa vie à aller d'un homme à un autre pour les écumer (VIGNY, Journal poète, 1829, p. 892). Terrible bonhomme qui écumait la place de Paris (ZOLA, Nana, 1880, p. 1455).
— Fam., rare. Ramasser çà et là, recueillir. Il va partout écumer des nouvelles (Ac. 1798-1932).
Prononc. et Orth. :[ekyme], (j') écume [ekym]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. I. Verbe intrans. 1. ca 1135 escumer « baver (d'une pers. ou d'un animal) » (Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 1073); 2. ca 1165 « se couvrir d'écume » (B. DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 27589); 3. ca 1230 « être au dernier degré de l'exaspération » (GERBERT DE MONTREUIL, Continuation de Perceval, éd. M. Williams, 9686). II. Verbe trans. 1. ca 1200 « débarrasser de l'écume » (Aliscans, éd. E. Wienbeck, 3320); 2. ca 1460 escumer « piller » (VILLON, Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 141). Dér. de écumer; dés. -er; au sens II, 1, é- a pris la valeur privative. Fréq. abs. littér. :245. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 347, b) 523; XXe s. : a) 338, b) 259.
DÉR. Écumage, subst. masc. Action d'enlever l'écume. Écumage des confitures (ROB., Lar. Lang. fr.). Domaine techn. L'écumage terminé, le plomb liquide enrichi est transporté en sens inverse (WURTZ, Dict. chim., t. 2, 2e vol., 1876, p. 1041). — []. Ds Ac. 1932. — 1re attest. 1838 (Ac. Compl. 1842); du rad. de écumer, suff. -age.
BBG. — DUCH. Beauté 1960, p. 24. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 64. — HENRY (A.). Anc. fr. saime. Romania. 1959, t. 80, p. 209. — QUEM. Fichier.
écumer [ekyme] v.
ÉTYM. V. 1135, escumer; de écume, et -er.
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1 Les brises fraîchissaient, la vague écumait et nous trempait souvent de ses jaillissements.
Lamartine, Graziella, Épisode, VII.
2 La mer monte, prend les rochers un à un, ensevelit celui-ci, lèche celui-là, écume sur cet autre (…)
J. Renard, Journal, 9 août 1887.
3 « Ton beau lac, il écume aujourd'hui comme une mauvaise mer », constata Antoine.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 63.
4 Le quadrupède écume, et son œil étincelle;
Il rugit : on se cache, on tremble à l'environ (…)
La Fontaine, Fables, II, 9.
♦ ☑ (V. 1230). Fig. Écumer (de rage) : être au dernier degré de l'exaspération (→ Boire, cit. 32). || Il écumait de rage, de colère. — Absolt. || Il écumait.
5 Le dit sieur recteur suait, tempêtait, écumait et frappait du pied (…)
la Satire Ménippée, p. 96, in Littré.
6 Cette réponse le fit écumer de rage. Il fit mine d'appeler ses gens pour me faire, dit-il, jeter par la fenêtre.
Rousseau, les Confessions, VII.
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II V. tr.
1 (V. 1200). Débarrasser de l'écume, des impuretés de l'écume (une matière). || Écumer le pot-au-feu. || Écumer des confitures. || Écumer le sucre, le sirop. || Ustensile qui sert à écumer. ⇒ Écumoire. || Écumer l'étain fondu.
♦ Par métaphore ou fig. (Vx). Débarrasser de toute impureté (→ Bouillonnant, cit.).
7 Vous aimer, penser à vous (…) m'occuper de vos affaires, m'inquiéter de ce que vous pensez (…) écumer votre cœur, comme j'écumais votre chambre des fâcheux dont je la voyais remplie (…)
Mme de Sévigné, 150, 1er avr. 1671.
8 Épurer son goût, en écumant son esprit, est un des avantages de la bonne compagnie et de la société des lettres, à Paris. Les idées médiocres s'y dépensent en conversation; on garde les exquises pour les écrire.
Joseph Joubert, Pensées, VIII, XXXIV.
♦ Par ext. (Vx). Débarrasser de l'écume (un récipient). || Écumer une marmite.
8.1 (…) elle met le pot-au-feu pour le bouillon; et, pendant qu'elle écume le pot, la lampe s'éteint.
A. Galland, les Mille et une Nuits, t. III, p. 291.
♦ ☑ Loc. fig. (1677, in D. D. L.). Vx ou régional. Écumer le pot, la marmite de qqn : vivre en parasite.
2 Parcourir en pillant, en raflant. ☑ Écumer les mers, les côtes, y exercer la piraterie. || Brigands qui écument les chemins. ⇒ Brigandage, écumeur.
9 Les corsaires ne cessaient d'écumer toutes les côtes et de faire mille ravages (…)
3 (1460, Villon). Piller (en raflant tout ce qui est profitable ou intéressant). || Écumer les richesses d'un endroit, écumer un héritage, écumer les affaires. || Les antiquaires ont écumé la région.
10 Monsieur de Vendôme arrivera affamé, et fort bien intentionné d'écumer ce qui reste d'argent dans cette province (…)
Mme de Sévigné, 867, nov. 1680.
♦ Par ext. Ramasser çà et là, recueillir. || Écumer des nouvelles.
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écumé, ée p. p. adj.
♦ || Pot-au-feu écumé. — Fig. et littér. Ramassé comme une écume, une impureté.
11 Il n'est pas un bandit écumé dans nos villes,
Pas un forçat hideux blanchi dans les prisons (…)
Hugo, les Chants du crépuscule, X.
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DÉR. Écumage, écumant, écumeur, écumoire.
Encyclopédie Universelle. 2012.