détaché, ée [ detaʃe ] adj.
• XIIe; de 1. détacher
1 ♦ Qui n'est plus attaché. Lien, ruban détaché, dénoué. — Séparé d'un tout. PIÈCES DÉTACHÉES, servant au remplacement des pièces usagées d'un mécanisme. Marchand d'accessoires et de pièces détachées.
2 ♦ (1640) Qui a ou qui exprime du détachement (1o). « Peux-tu voir tant de pleurs d'un œil si détaché ? » (P. Corneille). ⇒ indifférent. Il répondit d'un ton détaché. ⇒ désinvolte.
3 ♦ Mus. Notes détachées, non liées aux autres. — N. m. Faire un détaché. ⇒ 1. piqué, staccato.
4 ♦ Fonctionnaire détaché, affecté provisoirement à d'autres fonctions que les siennes.
⊗ CONTR. 1. Attaché, noué; passionné.
● détaché nom masculin Mode d'exécution musicale dans lequel les notes doivent être séparées.
détaché, ée
adj.
d1./d Qui n'est plus attaché.
d2./d Séparé. Pièce détachée, que l'on acquiert isolément pour remplacer une pièce usagée d'un mécanisme.
d3./d Fig. Qui vit dans le détachement; qui manifeste le détachement. Il est détaché de tout. Un air détaché.
⇒DÉTACHÉ, ÉE, part. passé et adj.
I.— Part. passé de détacher1.
II.— Adjectif
A.— Domaine concr. [En parlant d'un être animé ou d'un obj.]
1. Qui est dégagé du lien qui retenait, fermait, fixait; dont le lien est enlevé. Ses vêtements à demi détachés (CHATEAUBR., Natchez, 1826, p. 492). Une persienne détachée claqua contre la muraille (DUHAMEL, Désert Bièvres, 1937, p. 278).
2. P. ext. Qui est séparé de ce à quoi il adhérait ou avec lequel il était en contact; qui est coupé d'un autre, d'un tout. La feuille détachée d'un hêtre (SENANCOUR, Rêveries, 1799, p. 245).
— Spéc. [En parlant d'une partie du corps] Qui est écarté. Ce mouvement mit en lumière une main bien faite (...) avec un petit doigt coquettement détaché (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 101).
B.— P. anal. [À propos de liens abstr.]
1. [En parlant d'un élément] Qui est séparé, isolé d'un autre élément ou d'un ensemble, formant parfois un tout autonome. L'épaisse signature de son père, au prénom bien détaché du nom (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 40).
2. En partic.
a) [En parlant d'un obj.]
— FORTIF. Cette ville (...) avec ses quinze forts et ses six redoutes détachées (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 569).
— MÉCAN. Machines en pièces détachées (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1968, p. 214).
b) [En parlant d'un mode d'expr., d'un genre littér.] Qui n'a pas de rapport avec un autre quant au fond. Morceaux détachés; pensées, poésies détachées. Recueil composé de plusieurs pièces détachées sur différents sujets (STAËL, Allemagne, t. 3, 1810, p. 272).
c) [Avec une idée de mise en relief, d'attention attirée par rapport à ce qui est plus banal]
— [En parlant d'un élément de l'expression orale, d'un son] Qui n'est pas lié, qui est séparé du suivant par un court silence, après lequel on marque un arrêt. Une horloge sonna, à laquelle d'autres (...) répondirent; onze coups nettement détachés (COURTELINE, Train 8 h 47, 1888, 2e partie, 2, p. 110).
♦ Emploi subst. Elle possède une diction d'un détaché merveilleux (GONCOURT, Journal, 1894, p. 603).
♦ Spéc., MUS.
[En parlant d'une note] Le chœur y répond, très doucement, par des « amen », (...) en notes détachées (ROLLAND, Beeth., t. 2, 1928, p. 377).
[En parlant d'une manière de jouer un morceau] Qui se fait en détachant les notes. Jeu [pianistique] lié ou détaché, martelé ou porté (CORTOT, Techn. pianist., 1928, p. 8).
Emploi subst. Jouer en détaché. Le détaché de la note (DU BOS, Journal, 1922, p. 90).
— GRAMM. [En parlant d'un terme] Qui est séparé du noyau propositionnel contenant son support par l'intonation, la ponctuation ou une forme verbale. Adjectif détaché (cf. GREV. 1964, § 212, p. 151).
— Domaine des sens. [En parlant d'un animé, d'une chose] Qui ressort d'un ensemble.
♦ Domaine de la vue. Mme de Nevers au balcon, le profil détaché sur le bleu du ciel (SAINTE-BEUVE, Portr. femmes, 1844, p. 52).
Spéc., B.-A. Voilà les clartés qui illuminent le groupe principal détaché en vigueur sur les demi-teintes (DU CAMP, Hollande, 1859, p. 47).
♦ Domaine de l'ouïe :
• 1. Clotilde reconnaît maintenant, détachées des proches crépitements, la voix du crapeau-bœuf comme un petit chien qui jappe, et la gamme plaintive et toujours montante des singes ouas-ouas.
CHARDONNE, Femmes, 1961, p. 35.
d) [Avec, le plus souvent, une idée de mission partic. à remplir]
— [En parlant d'une pers. ou d'une collectivité] Qui est séparé d'un ensemble, généralement pour remplir une mission. Deux ouvriers détachés d'une équipe (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 192).
— Spécialement
♦ ADMIN. [En parlant d'un fonctionnaire, d'un militaire] Affecté à un poste différent de celui d'origine. Détaché au bureau arabe, il [le sergent] est dispensé des corvées (A. DAUDET, Lettres moulin, 1869, p. 203).
♦ ARM. [En parlant d'un soldat, d'un bâtiment de guerre] Ce devait être un poste détaché de hussards (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 131).
♦ SP. [En parlant d'un coureur] Qui a distancé les autres. Pollentier détaché à Fleurance (La Croix, 13 juill. 1976, p. 9).
Emploi subst. Zoetemelk a pris sa revanche en gagnant la Flèche wallonne, seul détaché (La Croix, 6 juill. 1976, p. 9).
C.— [En parlant d'une pers., d'une de ses facultés, d'une attitude] Qui est dégagé de liens de dépendance, d'intérêt, de liens moraux; qui est indifférent à quelque chose, à quelqu'un, qui manifeste de l'indifférence à ce qui l'entoure. D'un air, d'un regard, d'un ton détaché. Je me sens profondément détaché et désintéressé de tout (MAINE DE BIRAN, Journal, 1823, p. 386) :
• 2. Cet amour singulier, tantôt très exalté et tantôt assez détaché pour laisser place à une cruelle clairvoyance sur l'enfant et son milieu, n'eût peut-être pas duré très longtemps sans la maladie qui s'empara de la fillette; ...
BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, p. 197.
— Spécialement :
• 3. — Par exemple! dit le comte stupéfait (...). Comment! toi, Andrea, le pieux et le repentant, l'homme détaché des choses d'ici-bas, tu veux obéir à un préjugé?
PONSON DU TERRAIL, Rocambole, t. 3, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 374.
— Emploi subst. Il fait le rêveur et le détaché (COLETTE, Entrave, 1913, p. 60).
Encyclopédie Universelle. 2012.