BOUSINGOT
BOUSING
Bousingo, ou bouzingo, ou encore bousingot, appartient au vocabulaire romantique. Le mot est emprunté à l’argot de la marine anglaise (bousin = 1o cabaret, mauvais lieu; 2o tintamarre; 3o chapeau de marin). Ayant été employé dans le refrain d’une chanson: «nous avons fait du bouzingo», lors d’un tapage nocturne mémorable du Petit Cénacle, ce terme fut appliqué par la suite aux membres de ce dernier en raison de leur agitation et de leur débraillé vestimentaire. Eux-mêmes revendiquent le mot et décident d’une publication collective: Les Contes du Bouzingo ; seuls La Main de gloire , de Gérard de Nerval, et Onophrius Wphly , de Théophile Gautier, verront le jour.
Parallèlement, le mot se retrouve employé dans une acception politique et s’applique aux étudiants révolutionnaires qui participèrent aux émeutes de février et de juin 1832. Une série d’articles leur est consacrée dans Le Figaro (févr. 1832), faisant une assimilation un peu trop hâtive avec les Bousingots littéraires évoqués plus haut.
Enfin, bousingot désigne le chapeau de cuir verni, élément essentiel de la panoplie de la jeunesse romantique.
● bousingot nom masculin (de bousin) Nom donné en France, après la révolution de 1830, à de jeunes écrivains et artistes romantiques qui affichaient des opinions très libérales.
⇒BOUSINGOT, subst. masc.
,,Chapeau de marin en cuir bouilli, à bords plats, légèrement relevé, porté jusqu'à la fin du XIXe s.`` (LELOIR 1961).
— P. méton., HIST. [Au début de la Monarchie de juillet] Jeune romantique au costume négligé, souvent coiffé d'un chapeau de cuir bouilli et manifestant des opinions républicaines. Nous avons été émeutiers et bousingots (de cœur, si nous ne l'avons été de fait) (G. SAND, Correspondance, t. 2, 1841, p. 186).
♦ P. ext. Anarchiste :
• 1. Je ne sais pas comment le gouvernement arrange cela, mais, ma parole d'honneur, monsieur, je ne suis pas jacobin, monsieur, je ne suis pas bousingot, je ne lui veux pas de mal, mais si j'étais les ministres, ma parole la plus sacrée, cela irait autrement.
HUGO, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 933.
♦ Arg. Cabaret mal famé :
• 2. ... on alla à La puce qui renifle, un petit bousingot où il y avait un billard. Le chapelier fit un instant son nez, parce que c'était une maison pas très propre (...). Et la société de l'endroit avait commis tant de saletés sur le billard, que les billes y restaient collées.
ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 624.
PRONONC. — Seules transcr. mod. dans PASSY 1914 [] ou [-] (à ce sujet cf. abricot) et dans Pt Lar. 1968 [] LITTRÉ et DG qui transcrivent le mot pour le XIXe s. notent [z] à l'intérieur du mot.
ÉTYMOL. ET HIST.
I.— 1. Ca 1830 bouzingo « tapage » (Chanson des Jeunes France citée par A. Houssaye et O'Neddy dans MAT. Louis-Philippe, p. 37, note 2 : Nous avons fait ou nous ferons du bouzingo), attest. isolée; 2. 1877 bousingot « cabaret mal famé », supra ex. 2.
II.— 1. 1832 bousingot nom des jeunes qui après la révolution de 1830 affectaient des opinions très démocratiques (Figaro, 12 mars dans MAT. op. cit.); 1832 (Ibid., 22 févr., ibid. : bousingot [...] Type né de l'émeute et de l'indépendance des coiffures, homme politique par la barbe, par la chemise et surtout par le chapeau; physionomie de cuir verni qui se promenait dans la capitale); d'où 2. 1836 (RAYMOND, Suppl. au dict. de l'Ac., 6e éd. : Bousingot [...] Chapeau que portent les marins).
I dér. de bousin1 au sens de « tapage » et de « cabaret mal famé », avec suff. arg. -go(t), v. ESN., SAIN. Lang. par., p. 497 et NYROP t. 3, § 288, 2°. II peut-être dér. de I p. méton. et réinterprétation du suff. comme nom de pers. ou de chose (cf. NYROP, loc. cit.).
STAT. — Fréq. abs. littér. :7.
BBG. — BEHRENS D. 1927, p. 181. — DARM. 1877, p. 101. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 37. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 168, 495. — TEPPE (J.). Les Bousingots. Vie Lang. 1969, p. 630.
bousingot [buzɛ̃go] n. m.
ÉTYM. V. 1830, bouzingot; de 2. bousin.
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1 Vx, fam. Tapage. ⇒ 2. Bousin.
2 (1877). Vx. Cabaret mal famé. ⇒ Bouge, boui-boui, 2. bousin.
3 (1832). Anciennt (et hist.). Jeune républicain, après la révolution de 1830. || Les bousingots se distinguaient par leur accoutrement négligé, et en particulier portaient un chapeau de cuir bouilli, portant aussi ce nom (→ ci-dessous, 4.). || Usage des mots jacobin, bousingot et démagogue (cit. 3) au XIXe siècle.
1 Le résultat de ce conseil tenu par les chiens de garde fut qu'on s'était trompé, qu'il n'y avait pas eu de bruit, qu'il n'y avait là personne, qu'il était inutile de s'engager dans l'égout de ceinture, que ce serait du temps perdu, mais qu'il fallait se hâter d'aller vers Saint-Méry, que s'il y avait quelque chose à faire et quelque « bousingot » à dépister, c'était dans ce quartier-là.
Hugo, les Misérables, V, III, II.
2 Le Christ de l'Évangile était un bousingot.
France, Crainquebille, p. 7.
4 (1836). Anciennt. Chapeau de marin à larges bords, en cuir bouilli.
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DÉR. Bousingotisme.
Encyclopédie Universelle. 2012.