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autarchie

⇒AUTARCIE, AUTARCHIE, subst. fém.
I.— Vx et inus. ,,Satisfaction intérieure; modération, tempérance`` (Ac. Compl. 1842).
MÉD. ,,Frugalité, tempérance et sobriété. C'est l'opposé d'aplessie`` (BESCH. 1845).
Rem. Seul sens mentionné par NYSTEN 1824, Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, LITTRÉ-ROBIN 1865, Lar. 19e.
II.— Usuel. État d'une collectivité qui se suffit à elle-même pour la production et la consommation des biens.
ÉCON. POL. Régime économique dans lequel un État n'effectue pas ou effectue peu d'échanges commerciaux avec l'extérieur, soit par politique délibérée, soit contraint par les circonstances (guerre). Synon. économie fermée :
1. ... cependant qu'elles [les nations] tendent à se constituer chacune en système autonome, en économie fermée, en autarcie (comme on dit aujourd'hui), elles font de leur mieux pour produire bien plus qu'elles ne peuvent consommer, avec l'idée naïve d'écouler à l'extérieur leur surabondance, tout en recevant le moins possible de la surabondance des autres.
VALÉRY, Regards sur le monde actuel, 1931, p. 203.
2. Il n'y a pas cinquante ans, chacun de ces domaines avait son four à pain, rouissait son chanvre, filait sa laine, ne vendait, n'achetait ou n'échangeait presque aucun produit, vivait enfin dans une autarcie presque complète. Chaque chef de famille était une sorte de roi patriarcal. Cette autonomie économique avait été favorable au développement des fortes personnalités.
VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 138.
3. Fréquent en temps de guerre où il est imposé par les circonstances, ce système est, dans les temps modernes, non réaliste étant donnée la multiplication des communications et la diversité des ressources. En tant qu'isolationnisme, l'autarcie condamne à une vie réduite la collectivité qui l'applique.
MUCCH, Sc. soc., 1969.
Au fig. Tout système autonome. Autarcie intellectuelle :
4. Il leur [aux musiciens] paraît glorieux de constituer avec leur musique une autarchie — pour ne point dire un système cosmique à part — qui s'administre par ses seules lois. Ils excluent de leur analyse des formes musicales tous les éléments psychologiques et historiques, comme étrangers.
R. ROLLAND, Beethoven, t. 1, 1928, p. 16.
5. L'Allemagne, jusqu'en 1933, a tenu à cœur de traduire presque toutes les œuvres importantes de la littérature européenne contemporaine. L'autarchie intellectuelle du régime politique actuel, allant de pair avec l'autarchie industrielle et commerciale, entrave l'activité traductrice.
Arts et litt. dans la société contemp., 1936, p. 5612.
SYNT. Autarcie de repliement, — nationale, — impériale « vie en circuit fermé avec les territoires d'outre-mer » (cf. Lar. encyclop.). Autarcie d'isolement, — d'expansion (PERROUX, L'Écon. du XXe s., 1964, p. 88), — du IIIe Reich (H. TINARD, L'Automob., 1951, p. 345), politique d'- et d'expansion économique (B. CHENOT, Les Entr. nationalisées, 1956, p. 10), vivre en — (ROB.).
PRONONC. : autarcie [].
ÉTYMOL. ET HIST. — 1. 1793 méd. autarcie (J.-F. LAVOISIEN, Dict. portatif de méd., Paris, Barrois : Autarcie ... frugalité, sobriété, tempérance; ... contentement que l'on reçoit de son état. Il est opposé à aplestie [avidité insatiable]), ,,inusité`` d'apr. NYSTEN 1814-20; 2. 1896 pol. autarchie « gouvernement considéré comme personne autonome, ne subissant aucune contrainte et pratiquant un système d'économie fermée » (P.E.M. REVEILLÈRE, Tutelle et Autarchie — titre d'un ouvrage cité par DAUZAT, Ling. fr., p. 198); 1918 autarchie (LICHTENBERGER, PETIT, L'Impérialisme économique allemand, p. 73, ibid. : autarchie économique), forme très empl. surtout apr. la 1re guerre, jusque vers 1930 où triomphe autarcie; 1931 écon. autarcie « système d'économie autonome, économie fermée », VALÉRY, supra.
1 empr. au gr. « qualité de celui qui se suffit à soi-même » (ARISTOTE, Nic., 1, 7, 5 ds BAILLY) d'où « qualité de celui qui se contente de ce qu'il a »; 2 prob. créé à partir du préf. auto- et de l'élément suff. -archie (Meillet ds Fr. mod., t. 1, p. 116); le mot s'est répandu apr. la 1re guerre mondiale à la faveur du terme all. Autarkie [la finale étant assimilée à -archie] (KLAPPENBACH-STEINITZ, Wörterbuch der deutschen Gegenwartssprache, t. 1, p. 395), directement empr. au gr. dans l'accept. pol. et écon. aristotélicienne, recouvrant à la fois l'idée de « gouvernement autonome, pouvoir absolu » (gr. ) et l'idée d'« indépendance économique », de « système où le pays doit se suffire à lui-même » selon la doctrine d'autarcie nationale répandue dans les pays totalitaires av. la 2e guerre mondiale (v. ROMEUF); autarcie restitué par les philologues d'apr. l'étymon gr. (Dauzat, Meillet, loc. cit.; Spitzer ds Fr. mod., t. 2, p. 29).
STAT. — Fréq. abs. littér. :8.
BBG. — AQUIST. 1966. — BARR. 1967. — BAUDHUIN 1968. — BIROU 1966. — DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 197. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — GEORGE 1970. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — MUCCH. Sc. soc. 1969. — NYSTEN 1824. — ROMEUF t. 1 1956. — SCHÖNE (M.). À l'Office de la lang. fr. R. universitaire. 1938, n° 1, pp. 422-423. — SUAVET 1970. — TOURNEMILLE (J.). Étymol. et impropriétés. Déf. Lang. fr. 1966, n° 34, p. 20.

Encyclopédie Universelle. 2012.