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REFOULEMENT
REFOULEMENT

Opération constitutive de l’inconscient, le refoulement a été repéré par Freud dès ses premières observations cliniques. Il consiste à maintenir ou à repousser dans l’inconscient des représentations liées à des pulsions, capables, si elles étaient maintenues ou si elles avaient accès au système préconscient-conscient, d’y provoquer un déplaisir plus important que le plaisir lié à la satisfaction de ces pulsions. Comme à l’égard de tous les concepts introduits par lui dans la doctrine psychanalytique, Freud se place constamment dans une double perspective. La première consiste à donner une description clinique aussi complète que possible des phénomènes qu’il observe: commencée dès les Études sur l’hystérie en 1895, où il constate qu’«il y a des choses que le malade voulait oublier et qu’intentionnellement il maintenait, repoussait, refoulait hors de sa pensée consciente», cette description trouve son aboutissement dans les articles parus vingt ans plus tard sur le refoulement (die Verdrängung ) et sur l’inconscient. Elle est d’une précision telle que ni Freud ni ses successeurs n’auront rien à y reprendre. Signalons d’emblée qu’il y distingue trois temps: refoulement primaire ou originaire (Urverdrängung ), refoulement secondaire ou après coup (Nachdrängung ) et retour du refoulé. C’est du deuxième temps, que Freud nomme également refoulement proprement dit, qu’il est habituellement question lorsqu’on parle de refoulement. La seconde perspective tente de définir l’essence du refoulement ou, plus exactement d’en donner une description métapsychologique, c’est-à-dire précisant son tracé au niveau de l’appareil psychique, déterminant les ressorts de son fonctionnement, évaluant ses effets au niveau de la circulation et de la répartition de l’énergie psychique.

Ces trois points seront constamment remis en question, à partir notamment des remaniements apportés à la théorie par l’introduction, en 1920, de la notion de pulsion de mort et par l’élaboration, entre 1923 et 1925, de ce que l’on a appelé la seconde topique. Sur le plan économique, l’angoisse, d’effet du refoulement, en deviendra un des moteurs; sur le plan dynamique, Freud hésitera à donner au refoulement le statut de mécanisme défensif; sur le plan topique, enfin, se posera la question de la double inscription des représentations refoulées et surtout celle de la nature du refoulement originaire. Question qui est encore d’actualité et que même des auteurs comme Jacques Lacan n’abordent qu’avec une grande prudence.

Le mécanisme du refoulement

Le refoulement est l’un des destins possibles d’une motion pulsionnelle. Le concept de pulsion, déclare Freud, «est un concept limite entre le psychique et le somatique, comme le représentant psychique d’excitations issues de l’intérieur du corps et parvenant au psychisme, comme une mesure de l’exigence du travail qui est imposé au psychique en conséquence de la liaison au corporel». La vie psychique obéit au principe de constance, lui-même soumis au jeu du plaisir-déplaisir, principe constamment menacé par les sources d’excitation venues tant de l’intérieur du corps que du monde extérieur. C’est donc cette liaison entre le corporel et le psychique qui va déterminer le destin de la pulsion. «Le but de la pulsion est toujours la satisfaction, qui ne peut être obtenue qu’en supprimant l’état d’excitation à la source de la pulsion [...] son objet est ce en quoi ou par quoi elle peut atteindre son but»; il est essentiellement variable: objet étranger ou partie du corps propre, représentation au niveau de l’appareil psychique. On dit que la pulsion est liée à cette représentation, qu’elle l’investit. Mais, et c’est là un fait d’observation clinique, la pulsion n’est pas seulement liée à la représentation; elle l’est également «à quelque chose d’autre pour lequel le nom de quantum d’affect est admis; il correspond à la pulsion, en tant qu’elle s’est détachée de la représentation et trouve une expression conforme à sa quantité dans des processus qui sont ressentis sous forme d’affects». C’est dans cette immobilisation de l’affect que se situe le déplaisir, et le refoulement est une des modalités qui vont permettre la séparation de la représentation et de l’affect.

Dans le refoulement secondaire ou proprement dit, l’opération suppose plusieurs temps. En premier lieu, à la représentation préconsciente ou consciente qui est le support du déplaisir est retiré l’investissement qui appartient au système préconscient. Ensuite, pour empêcher que la représentation refoulée ne fasse irruption de nouveau dans le système préconscient-conscient, un contre-investissement se produit qui renforce l’action de la censure et qui protège le système préconscient contre la poussée de la représentation inconsciente (dans les exemples cliniques, on verra ce que Freud nomme contre-investissement). Enfin, malgré ce contre-investissement, la représentation refoulée peut se manifester au niveau de la conscience par ses rejetons. C’est ce que Freud nomme le retour du refoulé, lequel se traduit par ces formations que sont le lapsus, les oublis de noms, les actes manqués, le mot d’esprit. Dans ce dernier cas, on peut dire que tout se passe comme si le refoulement était momentanément levé. Un des caractères du refoulement est en effet, outre son individualité cliniquement évidente, sa mobilité. Il exige une dépense permanente de force. Si elle venait à cesser, un nouveau refoulement serait nécessaire. Cette mobilité trouve d’ailleurs son expression la plus exemplaire dans la formation du rêve, où le retrait nocturne de l’investissement de refoulement cesse au réveil. Il arrive enfin que le rejeton du refoulé puisse accéder au système préconscient-conscient de façon plus durable en contribuant à la formation du symptôme, qui devient ainsi un compromis entre les exigences des divers systèmes.

Cette description du refoulement secondaire appelle pour Freud plusieurs questions: il ne suffit pas, pense-t-il, qu’une représentation soit désinvestie par le système préconscient pour qu’elle demeure inconsciente; il faut bien que quelque force déjà présente l’y attire: «Nous sommes donc fondés à admettre un refoulement originaire, une première phase du refoulement qui consiste en ceci que le représentant psychique de la pulsion se voit refuser la prise en charge dans le conscient. Avec lui se produit une fixation; le représentant correspondant subsiste à partir de là, de façon inaltérable.» La nécessité logique de ce refoulement originaire, dont la dénomination apparaît pour la première fois dans le cas Schreber, était pressentie par Freud dès 1900 dans L’Interprétation des rêves : «L’existence d’un fond de souvenirs infantiles, soustraits dès le début à la surveillance du préconscient, est la première condition du refoulement.» Il devient clair, ainsi, que le refoulement proprement dit (secondaire) va porter sur «les rejetons psychiques du représentant refoulé [originairement] ou bien [sur] telles chaînes de pensées qui, venant d’ailleurs, se trouvent être entrées en relation associative avec lui». C’est donc un refoulement après coup. Ces représentations sont toujours liées à la sexualité, on verra plus loin comment. Le refoulement originaire ne se constitue pas, par définition, à partir d’un désinvestissement d’une représentation préconsciente, mais uniquement à partir d’un contre-investissement, qui est la censure elle-même.

D’autres questions se posent, et d’abord celle-ci: quel est le moteur du refoulement? Freud, assez imprécis dans la première partie de ses œuvres (la satisfaction de la pulsion créerait du plaisir à un endroit, du déplaisir à un autre), pointe avec précision par la suite l’angoisse de castration comme étant toujours à l’origine du refoulement. On peut se demander, d’autre part, si le refoulement est pour autant un mécanisme de défense au même titre que l’isolation, l’annulation rétroactive, la projection, etc. Freud n’a jamais soutenu cela qu’avec réticence. Cette question ne saurait en tout cas se poser qu’à propos du refoulement secondaire, la défense ne pouvant se concevoir, analytiquement, avant la constitution de l’inconscient. En troisième lieu se pose le problème de la double inscription: qu’advient-il de la représentation refoulée? Dans une première hypothèse, que Freud nomme fonctionnelle, inconscient et conscient ne sont que deux états différents d’une seule représentation située dans un même lieu. Dans une deuxième hypothèse, qu’il appelle topique, la représentation est inscrite dans les deux systèmes, le refoulement consistant alors à faire passer d’un système à l’autre l’énergie liée à ces représentations. Enfin, dans son article sur l’inconscient, il conclut ainsi: «Nous croyons maintenant tout d’un coup savoir en quoi une représentation consciente se distingue d’une représentation inconsciente. Ces deux représentations ne sont pas, comme nous l’avons pensé, des inscriptions différentes du même contenu dans des lieux psychiques différents, ni non plus des états d’investissement fonctionnels différents au même lieu: la représentation consciente comprend la représentation de chose plus la représentation du mot qui lui appartient; la représentation inconsciente est la représentation de chose seule.» Freud amorce ainsi le tournant qui va marquer la seconde partie de son œuvre; il apporte le germe d’où vont éclore les recherches modernes, notamment celles de Lacan. Une dernière question se pose enfin, touchant le destin de l’affect. C’est lui qui détermine la réussite du refoulement. Il est précisé par l’étude des variétés cliniques.

Le refoulement dans les diverses affections

Dans l’hystérie de conversion, le refoulement est constamment à l’œuvre: «Le contenu représentatif du représentant pulsionnel est radicalement soustrait à la conscience; comme formation de substitut et, en même temps, comme symptôme, une innervation très forte, somatique dans les cas typiques, de nature tantôt sensorielle, tantôt motrice, soit excitation, soit inhibition.» C’est une innervation somatique qui constitue le contre-investissement. Peut-on dire que le refoulement est réussi dans l’hystérie de conversion? Oui, si l’on considère le destin du quantum d’affect, dont la disparition est souvent complète («la belle indifférence des hystériques»). Non, si l’on considère l’importance des formations de substitut mises en œuvre: le refoulement, en effet, ne se fait pas une fois pour toutes, mais nécessite un travail constant. On conçoit donc, dans le cas de l’hystérique, où le symptôme sollicite sans trêve le concours de l’autre, que le confort ou l’inconfort qu’il apporte dépende essentiellement des circonstances de l’existence, notamment de la tolérance de l’entourage au symptôme.

Dans la névrose obsessionnelle, le contre-investissement se situe essentiellement au niveau des «formations réactionnelles» (par exemple, une propreté excessive au lieu et place d’une tendance à la saleté; la pitié envers les semblables masquant l’agressivité). Ces formations réactionnelles vont certes masquer l’affect, mais en raison de l’ambivalence qui a présidé à leur formation. C’est cette même ambivalence qui permet que ce soit au niveau de la formation réactionnelle que le refoulé fasse retour, de nouvelles tentatives de refoulement devenant alors nécessaires, qui, par déplacements successifs des représentations à écarter, vont porter le conflit obsessionnel sur des représentations de plus en plus éloignées et de caractère apparemment anodin. La lutte n’en continue donc pas moins sans fin et sans grand succès.

L’hystérie d’angoisse, ou névrose phobique, montre fort bien la constance du travail du refoulement et sa liaison avec l’étendue du contre-investissement. Dans un premier temps, l’affect est déplacé sur une représentation substitutive (un animal, par exemple), qui limite donc le champ d’apparition de l’angoisse. Mais «le processus de refoulement [...] n’est pas encore terminé! Il se trouve un autre but dans la tâche qui consiste à inhiber le développement d’angoisse émanant du substitut [...]. L’ensemble de l’environnement associé à la représentation substitutive est investi avec une particulière intensité [...] et, à chaque accroissement de l’excitation pulsionnelle, le rempart protecteur entourant la représentation substitutive doit être avancé un peu plus [...]. Si l’on considère le processus dans son ensemble, on peut dire qu’une nouvelle phase va répéter le travail de la précédente sur une plus grande échelle. Le système conscient se protège maintenant contre l’activation de la représentation substitutive par le contre-investissement de l’environnement.» Là encore, on conçoit que c’est à l’épreuve de la vie que va se mesurer ou non la réussite du refoulement.

Dans les psychoses, par contre, il est très difficile de se représenter en quoi peut consister l’opération du refoulement. Les représentations de mots ne s’y distinguent pas, en effet, des représentations de choses; ou, plus exactement, elles s’offrent à l’observation clinique comme si elles étaient des représentations de choses. On peut donc reprendre la question de Freud: «Le processus appelé ici refoulement a-t-il encore quoi que ce soit de commun avec le refoulement observé dans les névroses de transfert?» Pour Lacan, le psychotique n’aurait pas accès à l’organisation symbolique en tant que telle, par suite d’une faille dans la constitution de l’ordre inconscient, faille liée à un mécanisme spécifique, la forclusion, ou absence du signifiant du Nom-du-père au lieu de l’Autre, comme on le verra plus loin.

Enfin, il faut s’interroger sur les effets du refoulement chez l’homme dit normal. C’est le problème de l’éducation, de l’influence de l’environnement culturel sur le développement de l’individu. Les divers travaux sur cette question divergent, sous-tendus qu’ils sont tous par telle ou telle idéologie. Notons simplement, sans en tirer de conclusions, le contraste entre la truculence qui fait retour dans les pays de tradition pudibonde (Tom Jones ) et la subtilité des intrigues amoureuses dans les pays de tradition libérale, où le verbe est riche, dans les pays méditerranéens par exemple.

Le refoulement originaire
DIR
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«L’oracle dit à Agamède et Trophonios: Le septième jour, votre désir le plus cher sera exaucé. Le septième jour, ils furent tous deux trouvés morts dans leur lit.»/DIR

Jusqu’en 1915, Freud est entièrement occupé par sa découverte fondamentale sur les manifestations de l’inconscient. Il n’en pose pas moins dès le début de son œuvre la question de l’inné et de l’acquis d’une part, celle de la constitution de l’appareil psychique d’autre part. Il reprend la première de ces interrogations dans Au-delà du principe de plaisir , œuvre à la fois spéculative et référée sans cesse à la biologie. Il y affirme la dualité des pulsions gouvernant l’existence de l’homme, des pulsions de vie et de mort, Éros et Thanatos, que relie dans leur fonctionnement l’automatisme de répétition. Par ailleurs, faisant de la mort le but même de la vie, il pose implicitement la question de la jouissance comme liée à la mort.

La seconde question, qui a trait à la constitution de l’appareil psychique, est reprise par Freud avec l’élaboration des instances que sont le moi, le ça et le surmoi, élaboration connue sous le nom de seconde topique. En vérité, il est plus conforme à la logique de considérer qu’il s’agit là de la seule topique élaborée par Freud: ce qu’on appelle première topique (inconscient-préconscient) représente les effets de découpe produits dans l’appareil psychique par l’introduction du langage.

C’est, semble-t-il, dans cette perspective que Lacan reprend la lecture de Freud: «Le langage est la condition de l’inconscient [...]. La réduplication que le discours provoque est ce que Freud nomme l’Urverdrängung [refoulement originaire].»

Les zones érogènes, par le découpage qu’elles impriment à la pulsion et duquel naissent les pulsions partielles, marquent les limites que la vie du corps impose à la jouissance, limites dont le tracé est celui du plaisir, et, à proprement parler, du plaisir sexuel. Ce tracé suit les voies de l’apparition-disparition des objets pulsionnels (le sein, la voix, etc.), sans que cette apparition-disparition puisse se représenter en tant que telle, à ce stade où de ces objets Lacan dit «qu’ils sont la doublure, l’étoffe ou l’épaisseur imaginaire du sujet lui-même, qui s’identifie à ces objets». Sans doute trouve-t-elle son expression dans la «liaison» au niveau du moi, qui indique le passage de l’autoérotisme au narcissisme. Le désir de l’enfant se noue donc déjà aux signifiants du désir de l’Autre, sans pour autant que ces signifiants jouent pour lui en tant que tels. La jouissance ne se perd en effet définitivement qu’au moment de «l’entrée en fonction», pourrait-on dire, de ces signifiants-déjà-là, c’est-à-dire au moment où se rejoignent l’aventure œdipienne et l’accès au langage, ouvrant à l’enfant le monde et la culture.

L’œdipe, par l’entrée en scène d’un tiers, le père, non seulement prive l’enfant de l’objet de son désir, mais encore prive la mère de l’objet phallique, en l’occurrence l’enfant lui-même; ainsi s’ouvre la question du phallus, dont on conçoit aisément qu’elle ne puisse prendre sens qu’au registre symbolique, car c’est à celui-ci que s’effectue la castration de la mère, que l’enfant se perd à lui-même. Ce registre symbolique, c’est par l’accès au langage que l’enfant en prend maîtrise, accès au langage qui, en substituant à la relation immédiate de l’enfant au monde une relation médiate, fait que l’être imaginaire se perd au profit de la subjectivité. Cela ne se peut que lorsque l’enfant trouve sa place dans le monde du symbole, c’est-à-dire en s’identifiant au père comme à celui qui a le phallus. C’est là qu’intervient la fonction du Nom-du-père, où «il faut reconnaître le support de la fonction symbolique qui identifie sa personne à la figure de la Loi».

L’œdipe se soutient donc du langage et le langage de l’œdipe, selon une alternance qui n’ouvre à l’enfant le monde de la culture qu’en occultant la castration, pour y substituer le Nom-du-père comme figure de la Loi.

Le langage institue une coupure au niveau de l’appareil psychique. D’un côté, liaison des représentations à une parole elle-même ordonnée en un réseau cohérent, lesquelles représentations sont soumises aux lois du processus secondaire: monde de la limite donc; c’est le domaine du conscient. De l’autre, des représentations non liées, jouant de la liberté du processus primaire: monde de la castration en tant qu’elle ne peut s’inscrire que dans le non-dit, dans la coupure entre les signifiants, monde de la sexualité en tant que la sexualité est la coupure introduite par le signifiant au niveau de la jouissance; c’est le domaine de l’inconscient. Cela fait dire à Lacan que, si l’inconscient ne parle que de sexualité, ce n’est pas pour autant que la sexualité y est représentée.

Le refoulement originaire est donc un acte qui ouvre l’accès à la subjectivité, ce n’est pas une défense. Des avatars de l’aventure œdipienne et de l’accès au langage va dépendre sa plus ou moins grande réussite. Le refoulement secondaire, défense contre l’angoisse de castration, va essayer d’en combler les brèches.

C’est l’opération inverse qui est tentée dans la cure analytique. Il s’agit là, en levant au maximum les refoulements secondaires, de rétablir la situation du refoulement originaire pour chercher à l’assumer. À accepter qu’avec sa parole perdue dans l’analyse son être s’y soit également perdu et ne puisse se soutenir que de la position subjective, soit à soutenir ce qu’il en est du langage, l’analysant reconnaît la castration comme fondatrice de l’aventure humaine. C’est ce moment de perte que Lacan nomme le «désêtre», c’est ce que Freud désignait déjà dans la césure de son célèbre aphorisme: Wo es war, soll ich werden («Là où ça était, je doit advenir»).

refoulement [ r(ə)fulmɑ̃ ] n. m.
• 1802 techn.; 1538 « action d'émousser »; de refouler
1Action de refouler, de faire reculer. Refoulement des manifestants.
2(1857) Fig. Action de refuser l'extériorisation, la manifestation (de désirs, de sentiments que l'on ne peut pas ou ne veut pas satisfaire). Refoulement des instincts, des ambitions.
(1906) Psychan. Phénomène inconscient de défense par lequel le moi rejette une pulsion (sexuelle, agressive...), une idée opposée aux exigences du sur-moi. censure. L'oubli, selon Freud, a pour cause le refoulement. Cour. Refus des pulsions sexuelles, comportement qui en résulte ( refoulé).
⊗ CONTR. Assouvissement, défoulement.

refoulement nom masculin Action de refouler quelqu'un, un groupe, de les repousser. Action d'empêcher de s'extérioriser une réaction d'ordre affectif, de refuser d'accepter et de satisfaire une tendance naturelle. Chemin de fer Manœuvre dans laquelle l'engin moteur pousse les véhicules. Métallurgie Opération de mise en forme consistant à comprimer une pièce dans le sens de la longueur. (Le refoulement est utilisé dans le forgeage à chaud ou comme méthode d'essai de compression à froid.) Psychanalyse Poussée hors de la conscience, par les forces de la résistance, d'une représentation incompatible avec le maintien du plaisir du sujet. Technique Déplacement d'un liquide ou d'un gaz par l'action d'une pompe refoulante ou d'un compresseur. Dans une pompe, départ de la tuyauterie servant à évacuer le liquide vers les organes d'utilisation.

refoulement
n. m.
d1./d Action de refouler, de faire reculer, refluer.
d2./d PSYCHO Action de s'interdire d'exprimer un désir, un sentiment qu'on porte en soi profondément, ou de leur refuser l'accès à la conscience.
|| PSYCHAN Processus inconscient par lequel le moi s'efforce de repousser et de maintenir dans l'inconscient des représentations (pensées, images, souvenirs) dont l'émergence au niveau du conscient est incompatible avec les exigences (morales, sociales, etc.) qui constituent l' idéal du moi.

⇒REFOULEMENT, subst. masc.
Action de refouler; résultat de cette action.
A. — [Corresp. à refouler II A; le compl. d'obj. désigne des choses concr.]
1. [Avec idée de compression]
a) MÉD. V. refouler II A 1 b ex. de Nélaton. En partic. ,,Compression, dans un but thérapeutique, d'une portion de gencive pathologique ayant envahi une cavité de carie`` (COURTOIS 1972).
b) ARTILL. ,,Accroissement du diamètre de l'âme des bouches à feu, produit par le tir à l'emplacement du projectile`` (LITTRÉ).
2. [Avec idée de déplacement en arrière]
a) ,,Déplacement d'un liquide ou d'un gaz par l'action d'une pompe refoulante ou d'un compresseur`` (Eau 1981). Pendant le refoulement [dans une pompe d'une installation hydraulique], le clapet d'aspiration est appliqué sur son siège par l'eau refoulée (GORGEU, Machines-outils, 1928, p. 286).
b) CH. DE FER. Manœuvre par laquelle on fait reculer un train. De la disposition des aiguilles résulte que toutes les manœuvres dans les gares se font par refoulement (BRICKA, Cours ch. de fer, t. 2, 1894, p. 236).
c) P. ext. Recul. De plates surfaces vertes naquirent du refoulement des futaies (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 139).
B. — [Corresp. à refouler II B; le compl. d'obj. désigne des pers.] Ce soir, le commandant Riffault parlait de la campagne de 1870, d'une sortie désespérée qu'ils avaient tentée, au nombre de 2.500, de Balan, et de leur refoulement dans la petite ville (GONCOURT, Journal, 1886, p. 588):
1. Densité par refoulement. — On ne saurait trop faire part, dans la fluctuation des phénomènes humains, aux troubles dus aux chocs des peuples, aux invasions répétées, à un état chronique de guerre.
VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 41.
DR. INTERNAT. Refoulement des étrangers. ,,Acte par lequel la police des frontières s'oppose à l'entrée sur le territoire d'un État d'un ressortissant étranger qui cherche à y pénétrer`` (DEBB.-DAUDET Pol. 1981). ,,Mesure administrative, prise contre un étranger qui s'est vu refuser une carte de séjour en France, consistant à le reconduire à la frontière`` (Jur. 1981).
C. — [Corresp. à refouler II C; le compl. d'obj. désigne une réalité abstr.]
1. [P. oppos. à défoulement] Action de repousser plus ou moins consciemment des désirs, des sentiments que l'on ne peut ou que l'on ne veut pas exprimer. Refoulement de la colère, des larmes. Le (...) refoulement de désirs contrariés par une morale sévère (BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 19):
2. Dans cette haine bizarre à l'endroit de Paris, que de privations sensuelles, que d'années de refoulement, de plaisirs frustrés, d'envies... Ce n'est pas la première fois que je constate ce phénomène de la conscience puritaine.
GREEN, Journal, 1944, p. 149.
2. PSYCHANAL. ,,Mécanisme psychologique, généralement inconscient, qui serait à la base de nombreuses névroses et s'observerait plus accessoirement dans certaines psychoses. Il s'agit d'une opération psychique par laquelle le sujet repousse ou maintient dans l'inconscient des pensées, des images mentales ou des souvenirs liés à un désir profond et instinctif (pulsion) senti comme interdit ou contraire à certaines exigences morales`` (Lar. Méd. t. 3 1972). Le refoulement sexuel peut être dangereux à un point qu'on ne soupçonne pas toujours, quand une vie spirituelle très fortement organisée ne fournit pas le contrepoids nécessaire, ne rétablit pas l'équilibre (GREEN, Journal, 1944, p. 33). Une constitution complexe, en perpétuelle mutation, où s'agitent et tentent de s'équilibrer ses forces intérieures, ses diverses tendances, ses appétits et leur refoulement (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 436).
D. — [Corresp. à refouler III] J'ai signalé la violence et la fréquence des averses d'ouest. Avec des toits sous le vent, rien n'aurait empêché le refoulement d'eau (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 137).
P. anal. ou au fig. Retour (à, vers). Sur certains fronts il constatait on ne sait quel refoulement vers l'animalité, et ce lent retour de l'homme à la bête (HUGO, Homme qui rit, t. 2, 1869, p. 95).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1835. Étymol. et Hist. 1. 1538 « action d'émousser » (R. EST., Dict. latinogallicum, 325b d'apr. VAGANAY ds Rom. Forsch. t. 32, p. 148) — 1611 (COTGR.); 2. a) 1611 « action de refouler la charge de poudre dans le canon » (ibid.); b) 1771 refoulement des eaux (Trév.); 3. 1823 « action de faire reculer par la force » (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, p. 23); 4. a) 1829 « action de refouler des sentiments » (SAINTE-BEUVE, Premiers lundis, éd. M. Leroy, p. 660); b) 1906 psychanal. (A. MAEDER, Arch. de psychol., VI, p. 149 ds QUEM. DDL t. 21). Dér. de refouler; suff. -ment1. Fréq. abs. littér.:119. Bbg. QUEM. DDL t. 21, 29.

refoulement [ʀ(ə)fulmɑ̃] n. m.
ÉTYM. 1802; « action d'émousser », 1538; de refouler.
Action de refouler.
1 (1802). Vx. Action de refouler (une charge d'artillerie) dans le canon d'une pièce.
(1875). Techn. (ch. de f.). Action de refouler (un wagon, un convoi en formation, etc.).
Déplacement d'un fluide dans une tuyauterie par l'action d'un compresseur, d'une pompe.
Action de refouler (le métal). || Refoulement d'un rivet à la bouterolle.
2 Action de refouler (des personnes).Milit. || Refoulement des envahisseurs.Refoulement des immigrants étrangers; des résidents étrangers ( Expulsion).
3 (1857). Action de repousser, d'enfouir (des désirs, des sentiments que l'on ne peut pas ou ne veut pas satisfaire). || Refoulement des instincts, des ambitions (→ Inassouvi, cit. 5).
1 (…) ce prêtre étudiait sans cesse, ce qui l'aidait à porter sa chasteté, mais rien de plus dangereux qu'un tel refoulement (…) on lui avait refusé une femme, il avait épousé l'humanité. Cette plénitude énorme, au fond, c'est le vide.
Hugo, Quatre-vingt-treize, II, I, II.
2 Hélas vous ne faites donc pas la part de cette habitude effroyable de la solitude, de la misère, de la nécessité de m'imposer sans cesse le refoulement de toute expression ?
Baudelaire, Correspondance générale, t. VI, p. 19-20, 20 janv. 1858.
(1906, in D. D. L.). Psychan. Mécanisme inconscient de défense par lequel sont repoussées et maintenues hors de la conscience des représentations liées à une pulsion dont la satisfaction provoquerait un déplaisir insupportable à l'égard d'autres exigences (celles, par ex., du surmoi). || Le refoulement est « à l'origine de la constitution de l'inconscient comme domaine séparé du psychisme » (Laplanche et Pontalis). || Agent du refoulement. Censure, moi. || Refoulement et répression. || L'oubli (cit. 3), selon Freud, a pour cause le refoulement. || Liquidation ou refoulement d'un complexe. || Refoulement originaire, constituant les premiers noyaux inconscients qui exerceront ensuite une attraction sur d'autres contenus à refouler. aussi Fixation. || Refoulement après coup.
3 (…) l'appareil psychique a pour fonction la réduction des tensions instinctuelles déplaisantes, soit par leur décharge, soit par un processus (…) de défense et de refoulement (…) les tendances refoulées dans l'inconscient cherchant à se frayer un chemin, par exemple dans les rêves et les symptômes des névroses.
Daniel Lagache, la Psychanalyse, p. 12.
Cour. Refus des pulsions sexuelles; comportement qui en résulte.
CONTR. Aspiration. — Effusion. — Assouvissement, défoulement. — V. comp. de fouler.

Encyclopédie Universelle. 2012.