AUBÉPINE
AUBÉPINE
Pour l’usage médicinal, on peut réunir sous le même nom d’aubépine les deux Crataegus les plus répandus de la flore française: Crataegus monogyna Jacq. et C. laevigata (Poiret) D.C. (= C. oxyacantha auct.); rosacées malacées; leurs propriétés sont identiques. Noter cependant que, si les deux espèces fleurissent en mai, C. laevigata précède de huit à quinze jours C. monogyna . Cet étalement des éclosions permet parfois de remédier à l’insuffisance ou à la mauvaise qualité d’une cueillette. Les fleurs seules sont utilisées en phytothérapie moderne.
On trouve, dans les fouilles des cités lacustres des lacs du Bourget, d’Annecy et dans la plupart des palafittes d’Europe centrale, des accumulations de noyaux qui témoignent de l’utilisation alimentaire très ancienne des fruits de l’aubépine; mais les premières références à un emploi médicinal de la plante ne remontent qu’au XIIIe siècle. De là au début du XIXe siècle, l’aubépine ne connaît officiellement que quelques indications communes à tous les végétaux plus ou moins astringents (hémorragies, leucorrhée), et la plupart des médecins l’ignorent. Les meilleurs auteurs du siècle dernier n’en parlent pas. C’est seulement dans les années 1890-1900 que des phytothérapeutes, aux États-Unis d’abord, puis en France, découvrirent et expérimentèrent les propriétés cardiotoniques de cette plante que L. Binet devait qualifier, plus tard, de «valériane du cœur».
L’aubépine est au nombre des meilleures plantes cardiotoniques, antispasmodiques et sédatives de la flore d’Europe. La cure prolongée de l’infusion ou de la teinture s’adresse particulièrement aux désordres cardiaques d’origine nerveuse: arythmie, palpitations, douleurs de la région du cœur, sensation d’essoufflement, gêne respiratoire, nervosité. La plante régularise le rythme cardiaque et la circulation, exerce une action vaso-dilatatrice et paraît contribuer à la dissolution des dépôts dans l’artériosclérose. Elle est indiquée dans l’angine de poitrine, dans l’hypertension, dans les risques ou les suites d’infarctus, dans les séquelles nerveuses de la ménopause. Elle calme également les troubles propres du système nerveux, particulièrement du sympathique, et peut rendre des services appréciables aux anxieux, dans l’insomnie, l’irritabilité, les vertiges, les bourdonnements d’oreille.
On emploie l’infusion: 1 cuillerée à soupe de fleurs sèches pendant dix minutes dans une tasse d’eau bouillante; 2 ou 3 tasses par jour. La teinture alcoolique au 1/5 (pharmacie) permet un dosage plus précis. L’usage prolongé est sans risques, à condition de respecter les doses. Les cures de longue durée, seules à même d’améliorer les états chroniques, doivent être marquées de pauses d’une semaine sur quatre. Les excès ont une influence néfaste sur le tonus du cœur et de l’appareil digestif.
Les petits fruits (dits cenelles, poires d’oiseaux, poires du Seigneur), à la pulpe farineuse, à peine douceâtre à maturité, sont comestibles. Très consommés par les peuplades néolithiques, ils ont souvent servi d’aliment de disette dans l’Europe entière tout au long des temps historiques et jusqu’à la dernière guerre. On les mêlait, séchés au four et moulus, à la pâte du pain, parfois de manière courante dans les régions pauvres (d’où le nom allemand de Mehlbeere , «baie à farine»). Cet usage persisterait encore en Europe centrale. Par fermentation dans l’eau, ils donnent une piquette assez alcoolisée. Les cenelles, qui persistent longtemps sur l’arbuste, sont une précieuse ressource hivernale pour les oiseaux.
aubépine [ obepin ] n. f.
• aubespine av. 1170; lat. alba spina, littéralt « épine blanche »; aussi aubépin n. m. depuis XIIIe, lat. albus spinus
♦ Arbuste ou arbre épineux (rosacées), à fleurs odorantes blanches ou roses, à floraison précoce, à baies rouges (⇒ cenelle), utilisé pour les haies vives. ⇒ azerolier, buisson (ardent), région. cenellier, épine . — Branche fleurie de cet arbre. Un bouquet d'aubépine.
● aubépine nom féminin (latin populaire albispinus, du classique alba spina, aubépine) Arbre épineux (rosacée) aux fleurs parfumées blanches ou roses, aux fruits rouges comestibles (cenelles), utilisé comme haie de clôture et dont le bois, compact, convient au tournage. (Genre crataegus.) ● aubépine (synonymes) nom féminin (latin populaire albispinus, du classique alba spina, aubépine) Arbre épineux (rosacée) aux fleurs parfumées blanches ou roses, aux...
Synonymes :
- épine blanche
aubépine
n. f. Arbrisseau épineux (Fam. rosacées), à fleurs blanches, des régions tempérées. Les Québécois nomment cenellier l'aubépine sauvage.
⇒AUBÉPIN, subst. masc., AUBÉPINE, subst. fém.
A.— BOT. Plante arbustive à rameaux épineux, à petites fleurs blanches ou roses très odorantes, à baies rouges, astringentes; fleur ou branche fleurie de cet arbrisseau. Synon. épine blanche/rose, épine de mai, noble épine :
• 1. Il [Stephen] cueillit une branche d'aubépine (...) arracha les épines de la guirlande et en fit une couronne qu'il mit en tremblant dans les cheveux de la jeune fille (...) la couronne d'aubépine, avec ses feuilles dentelées et d'un vert sombre, et ses fleurs blanches en ombelle, était enlacée dans ses cheveux noirs en bandeau sur son front. — Magdeleine, dit Stephen, vous voici parée comme une fiancée.
KARR, Sous les tilleuls, 1832, p. 36.
• 2. Je ne rencontrais que quelques femmes de caserne, à l'air effronté, ramassant des violettes sur le talus de gazon des sentiers ou des épines en fleur sur les buissons. Depuis ce temps-là, l'odeur des violettes et la neige parfumée de l'aubépine, ces deux symptômes précurseurs du printemps, me sont demeurées en dégoût dans l'odorat et dans les yeux, parce que ces deux fleurs me rappellent toujours ces promenades moroses, ces haies monotones, ...
LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, p. 74.
• 3. C'est au mois de Marie que je me souviens d'avoir commencé à aimer les aubépines. (...) elles faisaient courir au milieu des flambeaux et des vases sacrés leurs branches attachées horizontalement les unes aux autres en un apprêt de fête, et qu'enjolivaient encore les festons de leur feuillage sur lequel étaient semés à profusion, comme sur une traîne de mariée, de petits bouquets de boutons d'une blancheur éclatante. Mais, sans oser les regarder qu'à la dérobée, je sentais que ces apprêts pompeux étaient vivants et que c'était la nature elle-même qui, en creusant ces découpures dans les feuilles, en ajoutant l'ornement suprême de ces blancs boutons, avait rendu cette décoration digne de ce qui était à la fois une réjouissance populaire et une solennité mystique. Plus haut s'ouvraient leurs corolles çà et là avec une grâce insouciante, retenant si négligemment, comme un dernier et vaporeux atour, le bouquet d'étamines, fines commes des fils de la Vierge, qui les embrumait tout entières, qu'en suivant, qu'en essayant de mimer au fond de moi le geste de leur efflorescence, je l'imaginais comme si ç'avait été le mouvement de tête étourdi et rapide, au regard coquet, aux pupilles diminuées, d'une blanche jeune fille, distraite et vive.
PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, p. 112.
B.— Au fig. [P. allus. à la grâce, à l'éclat, au parfum doux-amer de l'aubépine] :
• 4. Une à une, les petites filles descendirent. Il semblait que ce fût une floraison hâtive, des aubépines miraculeusement fleuries. Les robes blanches se gonflaient dans le soleil, se moiraient de transparences, où toutes les nuances délicates du blanc passaient comme sur des ailes de cygne.
ZOLA, Une Page d'amour, 1878, p. 1077.
• 5. En de féeriques soirs où l'eau se désagrège,
Plus d'un songeur, au bord des canaux rectilignes,
Se laissa remorquer par les cygnes! Beaux cygnes,
— Duvets d'aubépins blancs et plumage en barège —
Conduisant le songeur comme un Lohengrin vierge
Vers le doux lac d'amour où toute l'eau converge.
RODENBACH, Le Règne du silence, 1891, p. 78.
• 6. Il [Saint-Jean] avait un buisson de vin froid dans le ventre, et la gorge, et la tête, et des racines dans les deux cuisses, et des branches pleines d'épines brûlantes et de fleurs amères comme la fleur de l'aubépine, dans la bouche, sous la langue et près du cœur, un gros bouquet de ces fleurs amères et de ces épines de feu dans la source du sang.
GIONO, Batailles dans la montagne, 1937, p. 242.
PRONONC. ET ORTH. — 1. Forme phon. :[obepin]. PASSY 1914 note une durée mi-longue pour la 1re syll. du mot. Seule transcr. de aubépin ds LAND. 1834 et GATTEL 1841 : ô-bé-pein (GATTEL). 2. Hist. — Ac. 1798 écrit aubépin ou aubépine tout en précisant que ,,le mot d'Aubépine est beaucoup plus d'usage que celui d'Aubépin, qui ne se trouve que dans les Poésies anciennes``. Ac. 1835 signale la forme aubépin, s.v. aubépine. BESCH. 1845, Lar. 19e (et Nouv. Lar. ill.), ainsi que GUÉRIN 1892 consacrent une entrée indépendante à la forme aubépin mais pour souligner que cela ,,s'est dit autref. pour aubépine`` (cf. Lar. 19e). LITTRÉ (,,Aubépin, qui se trouve dans les patois, a été employé par Régnier``) et DG (,,On trouve en anc. franç. la forme masc. aubespin``) ne citent le mot qu'à titre hist. et s.v. aubépine (cf. aussi ROB.). BESCH. 1845 note également que ,,le peuple dit par corruption noble épine``. Cf. aussi LITTRÉ : ,,Dans le picard, nobépine est pour noble-épine nom qu'a porté aussi l'aubépine.``
ÉTYMOL. ET HIST. — XIIIe s. bot. albespin « aubépine » (SIMON DE POUILLE, Richel. 368, f° 150b ds GDF. : Flor d'albespin); 1268 aubespin (Claris et Laris, éd. J. Alton, 10728 ds T.-L.) — 1866, Lar. 19e, aubépin. Qualifié de ,,vieux`` dep. Ac. 1694.
Du lat. pop. albispinus « aubépine », forme du lat. de Gaule calquée sur un composé gaul. (ANDRÉ Bot., p. 22), de albus spinus « id. » (Antid. Cambridge, 164, ibid.), le lat. spinus désignant le prunier sauvage (VIRGILE, Georg. 4, 145 ds GAFF.).
STAT. — Aubépin. Fréq. abs. littér. :2. Aubépine. Fréq. abs. littér. :242. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 299, b) 428; XXe s. : a) 424, b) 289.
BBG. — BOUILLET 1859. — BRARD 1838. — CHASS. 1970. — DELAIGUE (J.). Les N. d'arbres dans la topon. de la Haute-Loire. Almanach de Brioude. 1962, t. 42, p. 153. — DUVAL 1959. — Forest. 1946. — FRANCE 1907. — GAY t. 1 1967 [1887]. — GOUG. Lang. pop. 1929, p. 82. — GOUG. Mots t. 1 1962, p. 279. — Lar. méd. 1970. — Lar. mén. 1926. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — Méd. Biol. t. 1 1970. — NYSTEN 1824. — PRIVAT-FOC. 1870.
aubépine [obepin] n. f.
ÉTYM. 1268, aubespin; albespin, XIIIe; du lat. pop. albispinum, lat. class. alba spina « épine (spina) blanche ».
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♦ Arbuste ou arbre épineux (Rosacées) à fleurs odorantes blanches ou roses, à floraison précoce, à baies rouges, utilisé pour les haies vives. ⇒ aussi Azerolier; → 1. Charme, cit. — Par ext. Branche fleurie, fleur de cet arbre. || Un bouquet d'aubépine.
1 Une blanche aubépine, une fleur, comme lui (l'enfant)
Dans le grand ravage oubliée.
Hugo, les Orientales, XVIII.
2 C'est au mois de Marie que je me souviens d'avoir commencé à aimer les aubépines (…) elles faisaient courir au milieu des flambeaux et des vases sacrés leurs branches attachées horizontalement les unes aux autres en un apprêt de fête, et qu'enjolivaient encore les festons de leur feuillage sur lequel étaient semés à profusion, comme sur une traîne de mariée, de petits bouquets de boutons d'une blancheur éclatante.
Proust, Du côté de chez Swann, Pl., t. I, p. 112.
REM. La forme masc. aubépin [obepɛ̃] est une réfection de l'anc. et moy. franç. aubespin.
➪ tableau Noms d'arbres, arbustes et arbrisseaux.
➪ tableau Noms de remèdes.
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DÉR. Aubépinier.
Encyclopédie Universelle. 2012.