MONOTHÉISME
Le monothéisme désigne la forme de religion selon laquelle il n’existe qu’un Dieu unique. Dans la mesure où l’on entend le monothéisme au sens strict (non seulement comme croyance en un seul Dieu, mais comme négation explicite de tous les autres dieux), il n’y a pour l’histoire des religions que quatre grandes religions monothéistes: la religion d’Israël, la religion de Zarathoustra (mazdéisme), le christianisme et l’islam.
On découvre cependant dans les religions primitives bien des formes de monothéisme qui peuvent coexister avec le polythéisme. On parlera alors plutôt de «monolâtrie» ou d’«hénothéisme»; le culte rendu à un dieu local ou national n’implique pas nécessairement le refus de l’existence d’autres dieux. Mais, même si l’on peut trouver à l’époque la plus reculée de l’histoire de l’humanité des cas de croyance en un Être suprême, on peut difficilement retenir la thèse d’un monothéisme primitif. Trop de faits mis en relief par l’ethnologie historique récente s’y opposent. Le vrai monothéisme ne se trouve pas au commencement de l’histoire de la religion, mais à son terme. Il ne faudrait pas pour autant en conclure qu’on serait passé par une évolution naturelle, selon un schéma linéaire, de l’animisme et du totémisme au polythéisme pour aboutir enfin au monothéisme. Les théories évolutionnistes du XIXe siècle sont aujourd’hui définitivement abondonnées en histoire des religions. Le monothéisme n’est pas le produit final des religions polythéistes. Il est dû bien plutôt à un refus décidé de tout polythéisme et représente une véritable révolution religieuse.
C’est dans la religion d’Israël qu’on trouve la forme la plus radicale de monothéisme. Pourtant, auprès de ce peuple enclin à l’idolâtrie et au polythéisme, le monothéisme fut long à s’imposer. À l’époque des patriarches, on rencontre peu de témoignages explicites en sa faveur. Moïse est considéré comme le vrai fondateur du monothéisme israélite. Encore vaut-il mieux parler à son sujet de «monoyahvisme» pratique et éthique. Ce n’est qu’au temps de l’Exil, dans le Deutéro-Isaïe, qu’éclate l’affirmation d’un monothéisme absolu et spéculatif. À cause de son influence déterminante sur le christianisme primitif, sur le judaïsme postérieur et sur l’islam, on s’attachera surtout ici à ce monothéisme biblique.
Le monothéisme et l’histoire des religions
La controverse qui, à propos des origines des religions, opposait la thèse du monothéisme et celle du polythéisme a perdu beaucoup de son intérêt, dans la mesure où l’histoire des religions, du fait des progrès de l’ethnologie moderne, n’est plus placée sous le signe de l’évolutionnisme. Parmi les représentants de cette théorie, il faut citer surtout E. B. Tylor qui voyait dans l’animisme la forme la plus primitive de la religion. Après cette phase, l’humanité aurait connu celle du polythéisme pour aboutir enfin à la forme la plus parfaite de la religion: le monothéisme. D’autres auteurs inséraient, entre l’animisme et le polythéisme, une phase «polydémoniste» et, entre le polythéisme et le monothéisme, une période de «monolâtrie» (adoration d’un seul Dieu, mais n’excluant pas l’existence d’autres êtres d’essence divine).
Contre la théorie animiste de Tylor qui niait tout rapport entre la morale et la religion, A. Lang crut pouvoir discerner chez les peuples les plus primitifs la croyance en un être supérieur, à la fois auteur et garant des lois morales. Les vues de Lang semblaient confirmées par l’œuvre monumentale de W. Schmidt qui crut pouvoir établir, à partir des matériaux nouveaux de l’ethnologie, la thèse d’une foi historiquement primitive en un Dieu transcendant: Urmonotheismus ou «monothéisme primitif». Selon lui, les formes dualistes ou polythéistes de la religion représenteraient des phénomènes de décadence. Et Schmidt s’efforçait de lier sa thèse du monothéisme primitif à l’idée théologique de révélation primitive.
Depuis lors, les spécialistes de l’histoire des religions refusent aussi bien la théorie évolutionniste que la thèse du monothéisme primitif (cf. A. Brelich, in H.-C. Puech dir., Histoire des religions , Encyclopédie de la Pléiade , t. I, Paris, 1970).
La conception évolutionniste supposait que l’on pût tracer une histoire verticale et universelle des religions en distinguant des étapes bien déterminées. Personne, de nos jours, ne croit plus à une évolution linéaire de la religion (pas plus que de l’humanité): au même degré présumé de développement, les historiens et les ethnologues seront surtout attentifs aux différences qualitatives qui caractérisent deux formations religieuses contemporaines. Les débats passionnés sur la question de savoir s’il y a eu à l’origine monothéisme ou polythéisme supposaient une conception de la religion définie surtout par les croyances en des puissances ou des êtres surhumains et la possibilité de distinguer les grandes religions en fonction de leurs divers types de croyance (croyance en des «esprits», en une pluralité de dieux, en un Dieu unique). Aujourd’hui, les variantes d’une religion à une autre compteront plus pour l’historien que l’identité des croyances. C’est pourquoi, d’ailleurs, les tenants de la méthode historique en histoire des religions demeurent méfiants à l’égard de la méthode de la «phénoménologie religieuse» moderne, qui voit – sur un plan horizontal – dans tel phénomène religieux concret une variante d’un même phénomène fondamental sans se préoccuper de son origine historique.
Les partisans de la théorie évolutionniste cherchaient à retrouver les formes «les plus primitives» de la religion: animisme, préanimisme, totémisme, magie, etc., qui auraient précédé le polythéisme et le monothéisme. Mais, au moment où l’ethnologie historique renonce au concept de primitif, il est fort difficile de parler de «religions primitives» qui correspondraient à un stade préhistorique de l’évolution humaine. On peut tout au plus utiliser de manière conventionnelle le terme «primitif» pour désigner un type de civilisation (qui ignore encore l’écriture et certaines techniques agricoles) distinct de celui des civilisations dites supérieures. Mais il serait inexact de vouloir trouver chez les peuples «primitifs» une période préreligieuse placée sous le signe de l’animisme et de la magie. M. Eliade a montré comment certaines formes très anciennes de prière s’adressent à un Être suprême qui a déjà les attributs du Dieu créateur.
Bien que Schmidt et ses disciples aient eu le mérite d’ébranler la théorie évolutionniste qui avait dominé l’histoire des religions pendant toute la seconde moitié du XIXe siècle, leur propre thèse du monothéisme primitif est de plus en plus contestée. Ainsi, Brelich relève: «On n’a trouvé jusqu’à présent aucun peuple primitif qui, à côté de l’Être suprême, ne connaisse d’autres êtres surhumains.» Dès l’origine, l’homme a éprouvé le besoin, pour assurer sa propre sécurité, de personnifier en un Être suprême la réalité incontrôlable dont il dépend. Mais il lui arrive aussi de distribuer le pouvoir de l’Être suprême entre plusieurs êtres surhumains ou esprits. Ces êtres surhumains peuvent être ou bien la personnification de tel aspect non humain de la réalité, ou bien une pure création en vue de protéger l’homme en face de l’incontrôlable. «On dirait presque qu’une antique humanité dans une phase de création religieuse s’est trouvée devant deux possibilités: recréer le non-humain sous des formes personnelles afin d’établir avec lui des rapports régis par des normes humaines, ou bien se créer des protecteurs surhumains afin de leur déléguer le soin d’affronter l’incontrôlable» (Brelich). C’est à cette seconde catégorie, celle des êtres surhumains «tutélaires», qu’il faut rattacher le Dieu unique des religions monothéistes.
Mais il faut insister sur la transcendance de ce Dieu unique et créateur par rapport à l’Être suprême des religions primitives. Le monothéisme ne se situe pas au commencement, mais à la fin de l’histoire religieuse de l’humanité. S’il est vrai que nombre des attributs propres au Dieu des religions monothéistes appartenaient déjà aux dieux des grandes religions polythéistes dans la mesure où ceux-ci étaient généralement des dieux ouraniens, le monothéisme n’est pas issu du polythéisme par évolution , mais par négation . C’est plutôt, selon R. Pettazoni, de «révolution» qu’il faut parler. L’apparition du monothéisme n’est pas liée nécessairement non plus au progrès de l’esprit humain, comme en témoigne l’exemple de la pensée philosophique grecque.
Avec la naissance des religions monothéistes, on se trouve en présence d’un événement particulier qui ne s’est produit que très peu de fois dans l’histoire de l’humanité. Et il est remarquable que dans chaque cas, à la différence des religions polythéistes, il s’agisse de religions «instituées», inséparables d’une grande personnalité religieuse: Moïse, Jésus, Zarathoustra, Mahomet.
La religion d’Israël
Les thèses de l’école libérale sur le monothéisme biblique (notamment J. Wellhausen) sont aujourd’hui dépassées. On ne cherche plus à montrer comment Israël serait passé progressivement, par une évolution naturelle, de l’animisme et du fétichisme au polythéisme pour parvenir lentement à travers la monolâtrie au monothéisme proprement dit. Il est cependant légitime de parler d’une explicitation progressive du monothéisme comme croyance à l’unicité du vrai Dieu. On peut distinguer dans ce processus la période des origines (celle des patriarches), celle qui va de la conquête de Canaan à l’Exil, enfin celle de l’Exil.
L’époque des patriarches
Si l’on définit le monothéisme comme la croyance en un seul Dieu, comportant la négation explicite de tout autre dieu, on ne trouve aucune mention nette d’un tel monothéisme à l’époque des patriarches. On peut tout au plus parler de «monolâtrie». La question de l’existence ou de la non-existence des dieux des autres peuples ne se pose même pas. Les ancêtres immédiats d’Abraham étaient polythéistes (Jos., XXIV, 2) et plusieurs passages de la Genèse montrent que les patriarches vénéraient un dieu El lié à tel ou tel sanctuaire palestinien: El-Très-Haut à Jérusalem (XIV, 19), El-d’Éternité à Bersabée (XXI, 33), El-Bethel à Bethel (XXXV, 7), El-Roï au puits de Lahai-Roï (XVI, 13). Le Dieu des patriarches se rattache au grand dieu El, chef du panthéon cananéen. Or ni El , ni Elohim n’ont le même sens que celui qui sera contenu dans le nom de Yahvé . «Ils désignent moins une personne de caractère individuel qu’une personne de nature divine, déterminée génériquement» (E. Stauffer). Il faut chercher la racine de ces noms, en tant que désignations d’un genre «Dieu», dans la religion polythéiste elle-même.
Or, le Dieu d’Abraham n’est pas seulement un dieu local, mais le «Dieu des pères», le Dieu tutélaire qui entretient des relations personnelles avec les membres de son clan. Et surtout, c’est le Dieu de l’élection, celui qui a parlé à Abraham (Gen., XII). Il est plus qu’un dieu tribal, car son pouvoir s’étend au-delà des clans patriarcaux (Gen., XI, 3; XX, 17-18; XXX, 27). Le dieu El d’Abraham ne semble pas différent du Dieu du grand-prêtre Melchisédech, le créateur du ciel et de la terre (Gen., XIV, 19 et 22). Aussi, pour l’époque des patriarches, peut-on déjà parler d’un «monothéisme pratique» ou d’un «hénothéisme» fondé sur la certitude d’avoir été choisi par Dieu parmi tous les peuples.
Avec la révélation du nom de Yahvé à Moïse, est-on déjà en présence d’un monothéisme absolu? Certains estiment que les témoignages de l’Ancien Testament ne permettent pas de répondre positivement à cette question. La claire reconnaissance d’un monothéisme absolu, qui nous semble évidente aujourd’hui, ne s’est imposée en effet que lentement à l’intérieur du peuple d’Israël. À l’époque mosaïque, l’affirmation du pouvoir unique de Yahvé est plus importante que la confession théorique de son unicité, à l’exclusion de tout autre dieu. On ne conteste pas l’existence d’autres dieux, mais Yahvé est conçu comme le plus puissant de tous les dieux, celui devant lequel les dieux des autres peuples doivent s’incliner. Le monothéisme israélite «est la transposition dans l’idéologie de l’unité et de l’unicité d’un groupe qui a affirmé son existence autonome en se mettant à part des autres dieux» (A. Caquot).
Cependant, le Dieu de Moïse est plus qu’un simple dieu national. Non seulement il exerce sa puissance sur les autres peuples, mais il intervient dans la nature et le cosmos. On peut parler à propos de Moïse d’un monoyahvisme pratique et son expérience religieuse est déjà en germe celle des prophètes quand ils expliciteront la croyance au Dieu unique n’admettant aucun partage avec d’autres dieux: «Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi» (Ex., XX, 3), «Tu n’adoreras aucun autre dieu, car Yahvé se nomme le jaloux, il est un dieu jaloux» (Ex., XXXIV, 14).
De la conquête de Canaan à l’Exil
Après la conquête de Canaan, l’influence des cultes naturistes (Baal, Astarté) de cette région entraîna un recul du monothéisme dans le peuple d’Israël. Ce fut le rôle des prophètes de dénoncer les tendances des Hébreux au polythéisme, à l’idolâtrie et au syncrétisme et de rappeler l’Alliance primitive conclue entre Dieu et son peuple. Sans doute Yahvé remplace-t-il peu à peu les Baals dans les sanctuaires du pays, mais on assiste à un danger de contamination de la représentation de Yahvé par celle de Baal (Os., II, 18). Entre le yahvisme et le culte de Baal, la lutte atteindra son point extrême en Samarie au début de l’époque des Rois. On possède plusieurs témoignages de l’existence des dieux étrangers et de leur puissance sur leurs territoires (cf. Jug., XI, 24; Sam., XXVI, 19; II Rois, III, 27). David lui-même a peur, s’il connaît l’exil, d’être obligé de servir les dieux étrangers (I Sam., XXVI, 19). Élie (vers 850 av. J.-C.) mène la lutte contre l’idolâtrie en prenant pour devise: «C’est Yahvé qui est Dieu» (ha-elohim! ) [I Rois, XVIII, 39]. Amos (vers 750) proclame que Yahvé est Dieu et qu’il est aussi le guide et le juge des peuples ennemis d’Israël (Am., I-II; IX, 7). En fait, Yahvé mène les autres peuples et les fait servir à son dessein (Is., X, 12-15).
Selon la vision d’Isaïe, les êtres célestes, les séraphins, doivent se voiler la face devant l’éclat redoutable de Yahvé qui règne en souverain sur tous les royaumes de la terre (Is., VI). Les dieux des nations sont comparés à des «néants»: elîhîm (Is., II, 8; X, 10; XIX, 3). Et Jérémie donnera aux dieux le nom de hèbèl , «souffle de vent», ou celui de lo-elohim , «non-dieux» (Jér., II, 11; V, 7). Peu de temps avant l’Exil, la réaction du milieu traditionnel et réformateur trouvera son expression dans la formule de foi du Deutéronome qui renvoie au monothéisme de Moïse: «Écoute Israël: Yahvé est notre Dieu, Yahvé est unique» (Deut., VI, 4).
Le temps de l’Exil
C’est en plein exil, alors que le peuple d’Israël est vaincu et soumis aux prestiges de l’idolâtrie et du polythéisme, qu’éclatent les affirmations les plus explicites du monothéisme absolu. Le Deutéro-Isaïe sera le témoin lyrique de ce qu’on peut appeler un «monothéisme spéculatif». «Il n’y a pas d’autres dieux que moi et nul autre en dehors de moi, Dieu juste et sauveur» (Is., XLV, 21). «Avant moi, aucun dieu ne fut formé et il n’y en aura pas après moi; moi, moi, je suis Yahvé, il n’y a pas d’autre sauveur que moi» (XLIII, 10-11). «Je suis le Premier et le Dernier: il n’y a pas d’autres dieux que moi» (XLIV, 6).
Avec le Deutéro-Isaïe, on est donc en présence d’un monothéisme absolu qui entraîne la négation explicite de l’existence d’autres dieux. Mais ces formules monothéistes ne représentent pas une doctrine révolutionnaire: elles sont plutôt le point d’aboutissement théologique du monoyahvisme pratique de Moïse qui était déjà plus qu’une monolâtrie. D’ailleurs, le monothéisme israélite est autre chose que le simple refus d’une pluralité de dieux. On retrouve par exemple un cas de monothéisme dans l’hymne du pharaon Achénaton au Soleil: «Toi, seul Dieu, en dehors duquel il n’en existe pas d’autre» (1350 av. J.-C.). Mais, comme Soleil divinisé, Aton est encore immanent au monde. Yahvé, lui, est bien présent partout; mais, comme Dieu créateur, éternel, tout-puissant et saint, il transcende le monde de la nature et l’histoire.
Le monothéisme radical d’Israël s’imposera encore une fois dans le monde sémitique, à savoir dans l’Islam. Déjà, dans l’Arabie ancienne, à côté des dieux tribaux, All h était reconnu comme créateur du monde. Mais c’est seulement Mahomet, conscient d’ailleurs de revivre pour son compte la vocation d’Abraham, qui fera reconnaître All h comme le Dieu unique à l’exclusion de tous les autres. Le premier article islamique est la confession de foi monothéiste: «Il n’y a pas de Dieu en dehors d’All h et Mu ムammad est son prophète.»
L’unicité de Dieu demeurera l’affirmation centrale du judaïsme postérieur, comme en témoigne la prière du Shema: «Écoute, Israël, le Seigneur, notre Dieu, est un seul.» L’unicité divine et celle du peuple sont inséparables. Cependant, un jour, Dieu sera l’unique Dieu pour le monde entier. Le judaïsme tardif admet l’existence d’une foule d’êtres intermédiaires ou anges; mais ils sont subordonnés au Dieu unique et doivent être considérés comme ses représentants dans la création et dans l’histoire. Le combat contre Satan y joue un rôle très important et le dualisme y a sa place. Le monothéisme dynamique de l’apocalyptique juive cherche à surmonter celui-ci et trouve son expression privilégiée dans l’attente du Messie, ou fils de l’homme, des derniers temps.
Le monothéisme chrétien
Le Nouveau Testament reprend à son compte le monothéisme de l’Ancien Testament comme un élément traditionnel (cf. Marc, XII, 29, où Jésus cite le Shema; I Cor., VIII, 4; Jacq., II, 19; I Tim., II, 5). On y retrouve les anciennes formules: «Dieu des pères» (Actes, III, 13; V, 30); «Dieu d’Israël» (Matth., XV, 31; Luc, I, 68; Jean, VIII, 41; Actes, XIII, 17; Hébr., XI, 6); «Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob» (Actes, III, 13; VII, 32; Matth., XXII, 32; Marc, XII, 36; Luc, XX, 37).
La confession de foi monothéiste est une évidence pour les premiers chrétiens, mais leur sens de Dieu se vérifie à la manière dont ils rejettent les idoles (II Cor., VI, 16) ou bien Mammon (Matth., VI, 24) ou les puissances du cosmos (Gal., IV, 8-9). Comme dans le judaïsme postérieur, on trouve dans le Nouveau Testament un certain dualisme, surtout chez saint Jean et chez saint Paul. Satan est le prince de ce monde (Jean, XII, 31), le dieu de ce monde (II Cor., IV, 4) et le seigneur du royaume des démons (I Jean, III, 8). En enlevant son pouvoir au prince de ce monde, le Christ ne compromet pas le monothéisme, il le consolide plutôt. Comme fils de Dieu, le Christ a les attributs et les pouvoirs de Dieu même. Il est le mandataire de Dieu, mais il ne le supplante pas. Il ne met pas en question l’unicité et la monarchie de Dieu, car il n’existe comme fils que dans sa dépendance et son appartenance absolue au Père.
Enfin, le monothéisme israélite trouve son accomplissement ultime dans la confession trinitaire (cf. Matth., XXVIII, 19) d’un Être divin unique en une pluralité de personnes. Loin de compromettre l’unité et l’unicité de Dieu, la révélation chrétienne du mystère trinitaire invite à ne pas comprendre le monothéisme dans un sens purement ontologique et spéculatif. L’unité du Dieu vivant est autre chose que l’identité de l’Être absolu comme fondement des étants.
monothéisme [ mɔnɔteism ] n. m.
• 1808; de mono- et théisme
♦ Croyance en un dieu unique. Le monothéisme des musulmans.
⊗ CONTR. Polythéisme.
● monothéisme nom masculin Religion qui n'admet l'existence que d'un dieu unique. (Le monothéisme est l'affirmation fondamentale des trois grandes religions méditerranéennes, le judaïsme, le christianisme et l'islam.) ● monothéisme (synonymes) nom masculin Religion qui n'admet l'existence que d'un dieu unique.
Contraires :
- polythéisme
monothéisme
n. m. Foi en un Dieu unique. Ant. polythéisme.
⇒MONOTHÉISME, subst. masc.
RELIG., PHILOS. Croyance en un seul Dieu; doctrine qui admet l'existence d'un Dieu unique, personnel, distinct de l'Univers dont il est le créateur et le maître. Anton. panthéisme, polythéisme. Monothéisme israélite, musulman; monothéisme trinitaire chrétien. Après avoir admirablement ébauché le culte de la femme, prélude nécessaire à la religion de l'humanité, le sentiment féodal détermina réellement, au siècle des Croisades, l'altération qu'éprouva le monothéisme occidental, quand la Vierge y tendit à remplacer Dieu (COMTE, Catéch. posit., 1852, p.365):
• ♦ ... il n'y a jamais eu de pluralisme définitif que dans la croyance aux esprits, et (...) le polythéisme proprement dit, avec sa mythologie, implique un monothéisme latent, où les divinités multiples n'existent que secondairement, comme représentatives du divin.
BERGSON, Deux sources, 1932, p.211.
— P. méton. Caractère monothéique. Les théologiens juifs les plus libéraux (...) ne manquent pas de faire ressortir que ce qui les touche dans l'enseignement moral et spirituel des évangiles, c'est précisément la fleur même du monothéisme éthique de la religion d'Israël (WEILL, Judaïsme, 1931, p.215).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1878. Étymol. et Hist. 1804, juin (CONSTANT, Journaux, p.97). Comp. à partir de polythéisme à l'aide de l'élém. formant mono-. Fréq. abs. littér.:54. Bbg. QUEM. DDL t.18.
monothéisme [mɔnoteism; mɔnɔteism] n. m.
ÉTYM. 1828; de mono-, et théisme.
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♦ Croyance en un Dieu unique. || Monothéisme des juifs, des chrétiens, des musulmans. || Monothéisme chrétien conciliable avec la Trinité. || Moïse et le monothéisme, œuvre de Freud.
0 Fondé sur le dogme clair et simple de l'unité divine, écartant le naturalisme et le panthéisme par cette phrase merveilleuse de netteté : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre » (…) le judaïsme avait une incontestable supériorité, et il était possible de prévoir dès lors qu'un jour le monde (…) quitterait la vieille mythologie pour le monothéisme.
Renan, Mélanges d'histoire et de voyages, Peuples sémitiques, Œ. compl., t. II, p. 329.
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CONTR. Polythéisme.
DÉR. Monothéique, monothéiste.
Encyclopédie Universelle. 2012.