LAND ART
LAND AR
Le land art est né aux États-Unis en 1967-1968, sous l’impulsion d’un groupe d’artistes qui entendaient dissocier pratiques artistiques et production d’objets. Désireux avant tout de sortir des structures du monde de l’art et de son idéologie (atelier de l’artiste-galerie-appartement du collectionneur), ils choisissaient la nature — mer, montagne, désert, campagne ou milieu urbain — comme champ d’expérimentation. S’affirmant également comme programme de vie et d’intervention sociale, le land art est apparu, à la fois aux États-Unis et en Europe, en même temps que les diverses révoltes étudiantes, le triomphe de la pop music et les premières communautés hippies. Crise de l’expression, refus du style, rupture avec les données traditionnelles de la création, ce «retour à la terre» (on rencontre aussi le nom de earth works ) pouvait également se percevoir comme une révolte contre l’esprit par trop formaliste du pop art, alors tout-puissant sur le marché de l’art. Courant essentiellement «environnemental», il couvre un ensemble de manifestations et de travaux réalisés dans la nature ou dans la ville (traces, ajouts, modifications, retraits, ou plus simplement comportements et manières d’être) où la nature cessant d’être le modèle devient l’outil, en principe sans intervention d’éléments extérieurs. Invisibles parce que situés le plus souvent dans des lieux inaccessibles, ces travaux ne sont communiqués au public qu’à l’aide de documents, cartes, plans, textes, films ou photos, d’une très grande austérité (le document doit parler de lui-même), la plupart du temps simple information sur le travail réalisé par l’artiste pour son compte personnel. Travaux éphémères, détruits sitôt créés ou livrés à l’usure du temps, les œuvres liées au land art ne peuvent se comprendre qu’effacées, insaisissables et réfractaires à toute possession. Le paysage est ainsi le support d’une action mentale, mais le land art se différencie de l’art conceptuel dans la mesure où il s’agit toujours à un moment donné d’une œuvre achevée, et dans le fait pour l’artiste de se trouver confronté, en matière de composition par exemple, à des problèmes formels qui sont ceux des artistes traditionnels. Gilles A. Tiberghien a publié en 1993 Land Art , une des premières synthèses sur ce courant de l’art contemporain.
Parmi les expositions qui ont révélé l’existence de ce courant original, il faut citer Earth Art , au White Museum d’Ithaca en 1969, et, la même année, les deux grandes manifestations organisées en Europe, au Stedelijk Museum d’Amsterdam, Op losse Schroeven , et à la Kunsthalle de Berne, Quand les attitudes deviennent formes , ces deux dernières regroupant en fait «tout ce que l’on n’avait pas encore vu et qui venait après le pop art et l’art minimal». On découvrait alors une génération d’artistes qui travaillaient directement sur le paysage, considérant la nature comme support d’une expérience artistique, mais qui étaient doués, sur le plan formel, de qualités évidentes auxquelles se joignait souvent une conception romantique de la nature. Il convient de citer parmi les précurseurs immédiats du land art Herbert Bayer, ancien professeur au Bauhaus, qui a créé en 1955 à l’Aspen Institute une œuvre intitulée Grass Mound , entièrement constituée en gazon, et qui écrivait: «Mes travaux s’aventurent dans la réalité de l’espace, plutôt qu’ils ne peignent l’illusion de l’espace sur un plan à deux dimensions.» Parmi les créateurs les plus importants liés à ce courant, mentionnons: les Américains Michael Heizer, dont les œuvres témoignent de l’immensité et de la durée de l’univers face à l’homme, Walter De Maria, qui a tracé à même le sol des lignes parallèles blanches dans le désert du Nevada, Dennis Oppenheim, qui travaille dans les champs, et Robert Smithson, qui modifie le comportement naturel de l’eau; les Britanniques Barry Flanagan, qui réalise ses travaux sur la mer, et Richard Long, qui coupe des pâquerettes dans un champ selon la forme d’une croix, tandis qu’il se livre également à des recherches sur les formes archétypales ou magiques; les Néerlandais Marinus Boezem, qui utilise le vent, ou Jan Dibbets, qui laboure une plage pour créer des perspectives corrigées; deux Français également, Sannejouand et Gette, dont certaines démarches peuvent être assimilées au land art; enfin deux jeunes Allemands, Barbara et Micael Leisgen, dont les «photos mimétiques» font d’une rencontre avec les paysages les lettres d’un langage qui permettrait de déchiffrer la nature.
Si le land art peut être considéré comme l’une des solutions les plus originales apportées au désir général de rupture par rapport aux conceptions anciennes de la création formelle, il n’a pas pour autant résolu l’un de ses problèmes majeurs. En effet, les photos réalisées lors de l’élaboration des travaux restent encadrées dans les galeries qui les présentent, prisonnières d’un circuit commercial. Cependant, il faut noter une expérience tentée en 1969 à Berlin par Gerry Schum, réalisateur de télévision qui, grâce à la vidéo, a assuré l’évolution du mouvement dans la mesure où le travail des landartistes pouvait être perçu «comme la communication de l’art au lieu de la possession d’objet d’art».
● land art nom masculin (américain land art) Tendance de l'art contemporain apparue aux États-Unis vers 1967 et caractérisée par un travail dans et sur la nature.
Land Art
mouvement artistique, apparu vers 1967-1970 aux États-Unis, qui utilise les paysages et autres éléments naturels.
land art [lɑ̃daʀt] n. m.
ÉTYM. V. 1970; angl. des États-Unis land art, 1967, « art de la Terre, art terrestre ».
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♦ Américanisme. Arts. Forme d'art consistant en interventions sur la nature (non utilitaires et à finalité esthétique). || « Les tenants du land-art (qui consiste à inscrire de faux indices sur le terrain) » (P. Ajame, le Nouvel Obs., 19 juin 1978, p. 75).
Encyclopédie Universelle. 2012.