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INTROJECTION
INTROJECTION

INTROJECTI

Terme utilisé en psychanalyse et introduit en 1909 par Sandor Ferenczi («Introjektion und Übertragung» — «Introjection et transfert» —, in Jahrbuch für Psychoanalyse , vol. I). Pour cet auteur, et en première approche, l’introjection caractérise d’abord les névrosés par opposition aux psychotiques (démence précoce, paranoïa). Le névrosé, en effet, «admet dans son moi une part aussi importante que possible du monde extérieur en en faisant l’objet d’imaginations inconscientes ». Un tel processus psychique contraste avec celui, inverse, de la projection.

Par la suite (1912), Ferenczi donne plus d’extension à ce concept: «Je décris l’introjection, écrit-il, comme l’extension de l’intérêt auto-érotique initial au monde extérieur par inclusion de ses objets dans le moi [...]. Au fond, l’homme ne peut aimer que lui-même; aime-t-il un objet, il l’absorbe.» C’est ce sens que reprennent J. Laplanche et J.-B. Pontalis: «Processus mis en évidence par l’investigation analytique: le sujet fait passer, sur un mode fantasmatique, du «dehors» au «dedans» des objets et des qualités inhérentes à ces objets» (Vocabulaire de la psychanalyse ).

On rapprochera l’introjection de l’objet d’amour (incorporation imaginaire) de l’avidité de la pulsion orale (penser au cannibalisme). L’identification se distingue de l’introjection, car elle est une incorporation sublimée, où l’objet se trouve sauvegardé. Pour K. Abraham, «l’introjection est un processus destiné soit à avoir ce qui vient à manquer (l’objet perdu), soit à le devenir (être pour avoir), soit à y aspirer sur le mode de l’identification» (I. Barande, Ferenczi , 1972). Dans le développement psychique de l’enfant, Ferenczi appelle «phases d’introjection» les phases de toute-puissance, où tout ce qui est vécu par l’enfant l’est comme faisant partie intégrante de lui-même; le monde extérieur n’est pas encore constitué (mégalomanie narcissique). De Freud citons seulement cette phrase (Le Moi et le Ça ): «L’objet auquel on a renoncé au-dehors, parce que haï, est introduit à la place de l’idéal du moi .»

Schématiquement, on dira que l’identification se situe plutôt dans le registre de l’être (être comme l’autre) et l’introjection dans celui de l’avoir (avoir ce qu’a ou ce qu’est l’autre). De tels concepts, désignant deux processus voisins d’investissement psychique, indiquent combien il est difficile de théoriser ce qui se passe à la limite du monde intérieur et du monde extérieur, à celle de l’être et de l’avoir. La difficulté prend un tour paradoxal si, avec les kleiniens, on admet que l’on n’introjecte que ce qui a d’abord été projeté, c’est-à-dire reconnu en tant qu’objet extérieur au moi; le processus d’introjection peut alors déboucher sur le conflit intrapsychique.

introjection [ ɛ̃trɔʒɛksjɔ̃ ] n. f.
• 1924; de intro- et (pro)jection
Psychan. Processus inconscient par lequel l'image d'une personne est incorporée au moi et au surmoi. Introjection de l'image des parents par l'enfant. identification, intériorisation.

introjection nom féminin (de projection) Processus qui consiste à transposer sur un mode fantasmatique les objets extérieurs et leurs qualités inhérentes dans les diverses instances de l'appareil psychique.

⇒INTROJECTION, subst. fém.
PSYCHANAL. ,,Processus inconscient par lequel l'image, le modèle d'une personne, est incorporé, identifié au moi ou au sur-moi`` (LEIF 1974). Le surmoi m'apparaît comme une introjection des parents + une introjection des frustrations du monde extérieur + la projection d'un mécanisme de défense contre ces frustrations mêmes (CHOISY, Psychanal., 1950, p. 129).
REM. 1. Introjecter, verbe trans. Incorporer au moi ou au sur-moi, par un processus inconscient, l'image, le modèle d'une personne. L'histoire de la passion et de l'impossible rupture est atroce, car le poète a comme introjecté cette femme tout à fait en dehors de ses expériences amoureuses (P.J. JOUVE, Le Tombeau de Baudelaire, p. 47 ds RHEIMS 1969). 2. Introjectif, -ive, adj. Qui procède de l'introjection. Tantôt elle [la conscience] (...) se nourrit des milieux qu'elle traverse, cédant plus ou moins lourdement à la somnolence de cette digestion. Tantôt elle (...) prévient, attaque, s'affirme. Conscience introjective et conscience éjective collaborent à l'expérience de la sociabilité (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 470).
Prononc. : []. Étymol. et Hist. 1909 (LALANDE, Vocab. technique et critique de la philosophie in Bull. de la Société fr. de philosophie, août, 266-7 ds QUEM. DDL t. 12 : terme employé par Avenarius [en allemand, 1888] pour désigner l'opération par laquelle nous nous représentons la conscience de chaque individu comme intérieure à son organisme, et la représentation des objets extérieurs comme une objectivation d'états internes). Mot créé par le psychologue allemand Avenarius [1843-1896], peut-être sur le modèle de Projektion; terme repris en psychanal. par Ferenczi et Freud.

introjection [ɛ̃tʀɔʒɛksjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1909, en philosophie, Lalande; all. Introjektion, Avenarius, 1888, de intro-, et Projektion. → Projection.
1 Hist. philos. Opération par laquelle la conscience de chaque individu est conçue comme intérieure à son organisme, et les représentations comme des objectivations d'états internes.
2 (1924; notion introduite par Ferenczi). Psychan. Processus inconscient par lequel l'image d'une personne est incorporée au Moi et au Surmoi (ex. : introjection de l'image des parents par l'enfant). || L'introjection fait partie des mécanismes de défense.
1 Le surmoi « est l'héritier du complexe d'Œdipe » (Freud). Lors de la liquidation du complexe d'Œdipe, il se produit une « introjection » compensatrice des images familiales.
Guy Palmade, la Psychothérapie, p. 67.
2 Freud adopte le terme d'introjection et l'oppose nettement à la projection. Le texte le plus explicite à cet égard est Pulsions et destins des pulsions (1915) où est envisagée la genèse de l'opposition sujet (moi)-objet (monde extérieur) en tant qu'elle est corrélative de l'opposition plaisir-déplaisir : le « moi-plaisir purifié » se constitue par une introjection de tout ce qui est source de plaisir et par une projection au-dehors de tout ce qui est occasion de déplaisir (…)
J. Laplanche et J.-B. Pontalis, Voc. de la psychanalyse, art. Introjection.
CONTR. Projection (5., psychol.).
DÉR. Introjecter, introjectif.

Encyclopédie Universelle. 2012.