GENTILLET (I.)
GENTILLET INNOCENT (mort en 1595?)
Publiciste, originaire du Dauphiné. Gentillet grandit dans la Réforme. Avocat, puis parlementaire, il est au fait des affaires au moins provinciales et rédige un certain nombre de libelles comme il en foisonna: Remonstrance au roi Henri III (1574), Apologie ou Défense par les chrétiens de France de la religion réformée (1578). Il doit sa célébrité, qui fut grande, à un ouvrage intitulé Discours sur les moyens de bien gouverner et maintenir en bonne paix un royaume [... ] contre Nicolas Machiavel (1576). Ce texte se situe parmi ceux qui sont parus, surtout du côté protestant, après la Saint-Barthélemy, et qui essaient d’argumenter contre l’absolutisme royal. Le plus connu fut la Franco-Gallia (1573) de Hotman, mais on peut en citer plusieurs autres. L’essentiel du texte de Gentillet prend à partie les thèses développées par Machiavel dans Le Prince , au nom d’un moralisme «démocratique», dont le sens le plus net est qu’il méconnaît totalement la portée de l’œuvre du Florentin. Comme la plupart de ses contemporains, Gentillet accuse Machiavel d’athéisme (épicurisme), sous prétexte que sa description du pouvoir politique ne fait pas intervenir les desseins de Dieu mais le calcul des hommes. Machiavel préconisait le régime de l’arbitraire royal comme le seul adapté à la situation politique de l’époque, il se voit accusé de noirceur morale et de défense de la tyrannie. En rédigeant cet anti-Machiavel, Gentillet s’inscrivait dans une tradition humaniste qui, réunissant en une seule notion morale et politique, allait perpétuer un aveuglement devant l’histoire, dont il fallut attendre près de deux siècles pour qu’il commençât à se dissiper.
Encyclopédie Universelle. 2012.